Repérage amiante : nouvelles briques normatives

Limiter les risques pour les travailleurs lors de toute intervention liée à la présence d'amiante commence par une étape indispensable : le repérage. Les modalités du repérage avant travaux de l'amiante ont été précisées par décret au mois de mai, alors que la norme révisée sur le repérage de l'amiante dans les immeubles bâtis est entrée en vigueur en octobre. Une actualité renforcée par la demande de la Direction générale du travail d'élaborer une série de normes sur le repérage amiante ailleurs que dans le bâti.

Selon le décret n° 2017-899 du 9 mai 2017 du ministère chargé du travail relatif au repérage de l'amiante avant certaines opérations, donneur d'ordres, maître d'ouvrage ou propriétaire d'immeuble, d'équipements, de matériels ou d'articles doivent « faire rechercher la présence d'amiante préalablement à toute opération comportant des risques d'exposition des travailleurs à l'amiante ». Cette obligation doit permettre à l'entreprise appelée à intervenir de procéder à l'évaluation des risques professionnels et d'ajuster les protections collectives et individuelles des travailleurs. « La recherche d'amiante est assurée par un repérage préalable à l'opération, adapté à sa nature, à son périmètre et au niveau de risque qu'elle présente », précise le décret. Les conditions dans lesquelles la mission de repérage est conduite, notamment s'agissant de ses modalités techniques et des méthodes d'analyse des matériaux, doivent être précisées par arrêté (les arrêtés faisant eux-mêmes référence à des normes) pour six domaines d'activité déterminés :

  • immeubles bâtis ;
  • autres immeubles tels que terrains, ouvrages de génie civil et infrastructures de transport ;
  • matériels roulants ferroviaires et autres matériels roulants de transports ;
  • navires, bateaux et autres engins flottants ;
  • aéronefs ;
  • installations, structures ou équipements concourant à la réalisation ou la mise en œuvre d'une activité.

Un protocole précis

Toute intervention sur des matériaux contenant de l'amiante peut émettre des particules et poussières dangereuses. Or, de par ses qualités isolantes, ses propriétés ignifuges, sa légèreté, sa facilité à être travaillé, son faible coût... l'amiante a été très utilisé, jusqu'à son interdiction en France en 1997. Un programme d'action a été progressivement mis en place par les pouvoirs publics afin de mieux protéger les occupants des immeubles et de renforcer la protection des travailleurs en contact avec les fibres. Ce dispositif a été renforcé et complété puis codifié. « L'efficacité de la démarche repose en grande partie sur la qualité de la première étape : le repérage des matériaux et produits contenant de l'amiante. Le diagnostic amiante est la clé, la porte d'entrée », insiste Éric Gaussorgues, chef de projet Afnor.

La nouvelle version de la norme NF X 46-020 sur le repérage des matériaux et produits contenant de l'amiante dans les immeubles bâtis, publiée début août, est entrée en application en octobre. Elle a pour objet de définir le contenu, la méthodologie et les modalités de réalisation des missions de repérage d'amiante dans les immeubles bâtis prévues par la réglementation française : repérage avant démolition, repérage avant réalisation de travaux, repérage avant-vente, repérage en vue de compléter ou de constituer les dossiers techniques amiante. Elle précise le rôle des différents acteurs (opérateur de repérage et donneur d'ordres) ainsi que les éléments à faire figurer dans les rapports de mission de repérage. « Le Code de la santé publique, le Code de la construction et le Code du travail se rejoignent sur des exigences complémentaires », indique Eric Gaussorgues.

L'objectif de la mission de repérage est de produire un rapport qui établit la présence ou l'absence d'amiante et, en cas de présence, la localisation de celui-ci. Il doit permettre d'appréhender le risque et de prendre les dispositions prévues par le Code du travail. « La norme décrit la démarche et donne le format du rapport de mission de repérage ; elle permet aux opérateurs de repérage de se couvrir en cas de procès ou litige », ajoute Éric Gaussorgues.

Les annexes, normatives, fournissent le descriptif des sondages et prélèvements à effectuer à partir de la liste des matériaux et produits susceptibles de contenir de l'amiante établie par les professionnels ; les modalités et techniques à mettre en œuvre pour les investigations approfondies ; les techniques à utiliser pour les sondages, prélèvements, analyses ; le rapport de mission de repérage des matériaux et produits contenant de l'amiante.

« Des notions un peu floues ont été précisées, les responsabilités mieux définies. La norme fournit au diagnostiqueur un protocole précis, relève Éric Gaussorgues. Dans tous les cas, il s'agit de s'appuyer sur des éléments fiables : l'année de fabrication du matériau peut être admise comme une preuve de l'absence d'amiante. La notion de zone présentant des similitudes d'ouvrage (ZPSO) permet d'optimiser l'organisation de la mission. Si on effectue un contrôle sur quatre fenêtres et qu'elles sont toutes amiantées, on considère que les autres fenêtres du bâtiment le sont aussi. »

Dès lors qu'il y a un risque, il est bien entendu obligatoire de faire des prélèvements, envoyés à un laboratoire compétent pour analyses. « Parallèlement, l'appareillage de repérage se développe. » Le plan de recherche et de développement amiante (PRDA) mis en place fin 2015 par le gouvernement finance la recherche sur des méthodes et technologies innovantes visant à réduire les coûts et délais de travaux sur les bâtiments.

Un décret, six domaines

Le décret du ministère chargé du travail a ouvert la voie à d'autres travaux de normalisation. « La Direction générale du trai'ail souhaite que les autres domaines d'activité soient également couverts par des normes ou séries de normes. La problématique est la même : le repérage de l'amiante avant certaines opérations », expose Clarisse Issanes, chef de projet Afnor. Des normes dédiées et adaptées à chacun des six domaines d'activité considérés doivent permettre de disposer de méthodes fiables, reconnues par les acteurs et basées sur leur expérience. Pour chacun des six domaines, un arrêté devra définir, sur la base du travail normatif préalable, les modalités techniques de réalisation du repérage avant travaux, les méthodes analytiques adaptées, les conditions de qualification des opérateurs chargés de les mettre en œuvre, le contenu des rapports de repérage, ainsi que les éventuelles exemptions.

Le premier domaine d'activité est donc couvert par la norme NF X 46-020, élaborée par la commission de normalisation (CN) Diagnostics dans les immeubles bâtis. Celle-ci doit, dans la mesure du possible, servir de modèle aux autres référentiels : « Il s'agit de décliner et d'adapter les dispositions de cette norme aux autres secteurs », souligne Clarisse Issanes.

Pour le domaine des terrains, ouvrages de génie civil et infrastructures de transport, la nouvelle CN du Bureau de normalisation des transports, des routes et de leurs aménagements (ENTRA) relative au repérage de l'amiante dans les sols et infrastructures est prête à lancer des travaux. De même, le Bureau de normalisation ferroviaire (BNF) s'implique pour les matériels roulants ferroviaires, comme le groupe de travail dédié à la CN Construction navale d'Afnor pour les bateaux et navires. Le Bureau de normalisation de l'aéronautique et de l'espace (BNAE) a été approché pour les aéronefs. Enfin, une nouvelle commission de normalisation a été créée. « La CN Repérage amiante - installations doit, d'une part, élaborer une norme fournissant des méthodes générales d'analyse et de repérage de la présence d'amiante pour les installations, structures ou équipements concourant à la réalisation ou à la mise en œuvre d'une activité et, d'autre part, assurer une mission de coordination des activités de normalisation relatives au repérage de l'amiante avant travaux », détaille Clarisse Issanes. Une action d'autant plus nécessaire que les délais sont contraints : les dispositions du décret 2017-899 doivent entrer en vigueur au plus tard le 1er octobre 2018.

La CN Repérage amiante - installations mène un inventaire pour cerner toutes les mises en œuvre de l'amiante, le champ couvert étant particulièrement large (métallurgie, production d'énergie, équipements industriels, pétrochimie...), afin de constituer le tour de table adéquat. Car la qualité d'une norme dépend de la qualité de la mutualisation.

 

 

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