Le juste sens des mots et des maux sur les conditions de travail

Classé dans la catégorie : Général

On constate très clairement aujourd'hui dans les entreprises et la vie quotidienne, un déplacement du sens des mots. Ils sont souvent détournés de leur contexte ou de leur juste définition pour décrire une situation ou les maux ressentis dans le cadre du travail.

Nous avons noté dans nos entretiens en entreprises lors de diagnostic QVT/RPS ; la difficulté pour certains collaborateurs d'ajuster à leur ressenti, le mot le plus adapté et par conséquent nous les entendons recourir aux termes à la mode largement diffusés dans les médias. Cela nous amène à rester très prudents sur l'interprétation des situations de travail évoquées et à nous faire, si besoin, assister de partenaires experts aptes à pousser l'investigation plus loin (médecin, psychologues).

Cette situation récurrente nous a amenés en tant que consultants, à nous poser la question des causes de ce déplacement sémantique généralisé et à analyser les effets qu'il génère. Cette analyse mériterait évidemment d'être approfondie, car elle n'est basée que sur le constat des organisations d'entreprises rencontrées.

Nous avons constaté en effet qu'il est plus facile à un collaborateur d'exprimer ses ressentis par un mot passe-partout qui est rentré dans les usages courants de la langue et donc compris de tous (et par conséquent pense-t-il, du consultant qui le questionne) pour exprimer son malaise ou son insatisfaction ; plutôt que d'expliciter ses émotions et d'en analyser les causes. Cela exigerait de sa part une distanciation et une prise de recul. L'entreprise vit dans l'immédiateté et les collaborateurs n'ont ni le temps ni les lieux permettant cette réflexivité nécessaire pour faire " la part des choses " et ajuster leur système relationnel. Le management intermédiaire, englué dans des tâches gestionnaires, n'a plus la capacité de mettre en place des temps de régulations au sein de l'équipe ; ce qui laisse le champ libre à tout type de comportements. Ceux-ci s'expriment au travers de postures de victimes, de bourreaux ou de sauveurs selon le rôle que l'on se choisit au sein de l'équipe. Il faut donc pouvoir créer du temps pour que les collaborateurs puissent débattre, se confronter et se rencontrer. Ils doivent ré-apprendre à ajuster leurs modes de fonctionnement et à appréhender le juste sens des situations. On constate, lorsqu'on anime ces groupes de collaborateurs, que les "maux mis en mots", reformulés pour décrire le plus précisément possible la situation partagée, dédramatisent souvent les tensions et permettent de trouver ensemble des ajustements.

De plus, il est habituel pour l'entreprise de se tourner vers l'expert (expert finance, expert qualité etc...) qui est identifié au sein d'une organisation, comme détenant le savoir pour résoudre un problème. Le médecin du travail devient donc naturellement l'expert à qui l'on va déléguer la prise en charge du mal-être ou de de la santé mentale du collaborateur lorsque celui exprime un symptôme que l'entreprise ne sait pas gérer.

Paradoxalement, malgré les multiples canaux de communication, on manque d'interrelations entre collaborateurs, ce qui amoindrit la capacité de discernement et contribue sans doute à renforcer les ressentis négatifs.

 

 

 

 

 

 

 

Pour aller plus loin sur le thème du "mal a dit" : Grand dictionnaire des malaises et maladies

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