Accidentalité routière au travail

L’apport des approches comportementales, Systémiques et Culturelles à l’amélioration de la sécurité.

Partie 1 : L’approche comportementale

A l’origine d’un accident, il y a toujours une combinaison de multiples facteurs et il est aujourd’hui admis que la composante "comportement" intervient dans la majorité des cas.

Les réponses apportées par les conducteurs, lors d’une enquête statistique sur les comportements (baromètre AXA Prévention), se retrouvent également dans l’analyse des accidents du rapport d’étude ONISR sur l’accidentalité routière en 2018.

Les conducteurs sont conscients des comportements inappropriés qu’ils adoptent et de leurs conséquences potentielles, mais ils ne changent pas. Qu’est-ce que cela nous indique sur leurs motivations, et que faut-il faire pour inciter un changement positif.

En utilisant un modèle de causalité des accidents, il est possible de procéder à une analyse détaillée des comportements relevés, et d’engager des actions appropriées. En général, ce type d’analyse conduit à relever des écarts concernant : l’attention, l’information, la formation, la supervision, la communication, la culture et la répétition de l’information.

La première étape pour changer un comportement est de comprendre pourquoi les gens se comportent de cette façon. La méthode ABC (Activators, Behaviour, Consequences) permet de comprendre le comportement du point de vue de cette personne.

Selon cette méthode, pour modifier un comportement, on peut agir sur les éléments déclencheurs (par exemple : un panneau vous indique de limiter votre vitesse) et/ou sur les conséquences (par exemple : une suspension de votre permis en cas d’excès de vitesse). En fonction du caractère (immédiat ou futur, positif ou négatif, certain ou incertain) de chaque conséquence, il est envisageable d’influencer la personne en l’incitant à modifier son comportement.

L’erreur est humaine et elle intervient dans le processus de décision qui induit comportement relevé. Procéder à la suite des incidents et des accidents à une analyse du type d’erreur permet de déterminer le lien avec le comportement induit et de proposer des solutions utiles.

La classification des erreurs peut s’envisager sous différents aspects (comportemental, contextuel ou conceptuel) et dans le déroulement de l’analyse, il importe de distinguer les erreurs involontaires (perception, mémoire, décision, actions, ...) des erreurs volontaires.

Pour les erreurs volontaires, le processus d’analyse doit permettre d’identifier les raisons (ou croyances) qui conduisent les choix faits par les personnes concernées. Par exemple : "je roule vite pour voir plus de clients et faire plaisir à mon chef", qui renvoie à nos propres capacités de perception et d’analyse, est différent de "je roule vite car j’aime faire la course avec les autres sur la route"), qui correspond à une volonté de violation des règles. Les processus de correction seront alors adaptés en fonction du caractère de l’erreur relevée.

Lors de l’analyse des erreurs, il est utile de considérer quelles barrières (systèmes de défenses qui sont mis en place pour les prévenir) ont été franchies. Le modèle des cinq barrières (le Cheese Cake de James Reason) permet ainsi de mettre en évidence les sources de défaillances et de distinguer les erreurs actives des défaillances latentes (vues ici sous l’angle des comportements).

Cette vision en barrières superposées, assurant chacune un rôle indépendant dans la protection globale d’un système, confirme s’il en était besoin, que la sécurité sur la route n’est pas de la responsabilité unique du conducteur, et que l’ensemble de l’organisation est responsable de la sécurité des personnes qui conduisent pour des raisons professionnelles et/ou pour se rendre à leur travail.

La défaillance étant possible dans la prise de décisions à tous les niveaux de l’organisation, celle-ci doit être considérée comme un type d'erreur racine susceptible d’induire le comportement. Cela invite à s’interroger sur l’influence de la culture d’entreprise et des procédés organisationnels (maintenance, management, planification, etc.) dont les impacts sur la sécurité peuvent être aussi bien positifs que négatifs.

Vouloir agir sur les comportements implique de passer en revue l’évaluation des risques et de ne pas se limiter à inscrire " le risque routier " sur une seule ligne dans le document unique d’évaluation des risques professionnels (DU). De même, il est illusoire de penser que la seule réponse à apporter soit d’engager des formations eu égard à la gravité des conséquences relevées.

Ainsi, il est envisageable d’utiliser l’approche comportementale pour engager une culture positive en matière de santé et de sécurité et faire évoluer votre système de management.

Pourquoi l’approche comportementale est importante ?

L’approche comportementale mise sur l’amélioration des résultats par l’adoption de comportements préventifs pour réduire les risques et sur l’apport de valeurs pour fonder une culture sécuritaire. Dans ce cadre, la sensibilisation et l’implication des personnes participent à l’ancrage de cette culture et s’amplifie par le feedback donné aux employés sur des comportements spécifiques lors des observations.

Comme indiqué au début de cet article, la survenue d’un accident ne peut être imputée à un facteur unique, quand bien même il s’agirait d’un comportement à risque, puisque celui-ci résulte de l’effet combiné de multiples facteurs (environnement et conditions de travail, politique sécurité, formation, croyances de l’individu concernant le risque, communication avec l’encadrement, organisation, normes et réglementations, état de l’équipement, disponibilité ou non d’équipements de protection, etc.).

Différentes études montrent que l’approche comportementale ne suffit pas à elle seule à produire les améliorations nécessaires, mais que son apport à l’approche systémique est notable. En cumulant les approches systémiques et comportementales, on dispose de multiples façons de réduire les risques et il est de la responsabilité de la direction de l’organisation d’utiliser les méthodes convenables afin de répondre à ses besoins de prévention des risques et de protection des personnes.

L’amélioration des performances implique de dépasser le simple objectif de conformité (aux normes, à la réglementation, …).

Une politique de santé et sécurité au travail, c’est bon pour les affaires.

Les entreprises ont tout intérêt à intégrer la santé et la sécurité dans leurs activités de gestion. Et si vous avez encore un doute, les questions suivantes devraient vous aider :

  • En cas d’incident, est-ce que votre entreprise en subirait les conséquences ?
  • Est-ce que la perte d’un ou plusieurs membres clés de votre personnel serait préjudiciable à votre entreprise ?
  • Voyez-vous l’intérêt d’une assurance moins coûteuse ou d’une amélioration de la productivité ?
  • Est-ce que vos clients, investisseurs ou banques sont en faveur d’une approche responsable, gérée en fonction des risques ?

Si la réponse à l’une ou l’autre de ces questions est « oui », la santé et sécurité au travail a des chances d’être un des principaux éléments de réussite de votre entreprise.

La santé et sécurité au travail appartient à la dimension sociale de la RSE. Elle fait partie intégrante de votre Responsabilité Sociale (et Sociétale) d’Entrepreneur.

Le prochain article sera consacré à l’apport d’une approche systémique dans la prévention du risque routier.

Pour ceux qui souhaitent aller plus loin :

  • Nous contacter
  • Lire : L’erreur humaine – James Reason (Presses des Mines)
  • Bradley curve – Process safety and Environmental protection
  • ABC analysis – Leadership and worker involvement toolkit
  • Rapport d’analyse sur les risques au travail – 2017 OSHA
  • Rapport accidentalité routière 2018 – ONISR
  • ISO 39001 , ISO 45001, ISO26000

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