Rapport Lecocq : système simplifié, prévention renforcée

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En août dernier, la députée LREM du Nord Charlotte Lecocq présentait son rapport « Santé au travail : vers un système simplifié pour une prévention renforcée ». Objectif : transformer en profondeur le système de prévention des risques professionnels. Analyse et décryptage.

Notre système de prévention des risques professionnels est-il toujours adapté aux enjeux actuels ? Face à l'apparition de risques nouveaux, notamment pour la santé psychologique des salariés, nous sommes en droit de nous poser cette question. Depuis de nombreuses années, le système français est critiqué, et les gouvernements se sont succédé en procédant à des aménagements par « petites touches » sans qu'aucune refonte en profondeur n'ait été engagée. Or nous sommes dans une période de stagnation. Le nombre d'accidents du travail baisse, mais très lentement depuis trente ans : dans ses derniers chiffres, l'Assurance maladie recense 626 227 accidents en 2016, soit une baisse de 0,3 % sur un an. Du côté des maladies professionnelles, le nombre de pathologies prises en charge diminue depuis 2012. Ainsi a-t-il baissé de 4,3 % en 2016. Toutefois, parmi elles, les affections psychiques ont légèrement augmenté. D'où la nécessité de réformer en profondeur notre système. Pour relever ce défi, le Premier ministre a confié en janvier 2018 à Charlotte Lecocq, députée LREM du Nord, le soin de conduire avec Bruno Dupuis, consultant senior en management, et Henri Forest, ancien secrétaire confédéral CFDT, une mission relative à la santé au travail. Après un travail de consultation auprès des acteurs de terrain (chefs d'entreprise de TPE et PME, ressources humaines, représentants du personnel, préventeurs), celle-ci a rendu en août dernier son rapport, qui associe dix-sept propositions pour un nouveau système de prévention des risques professionnels allégé et plus lisible avec un objectif fort : « prévenir plutôt que réparer ».

Alléger le mille-feuille et créer un guichet unique

C'est l'un des premiers constats auprès des acteurs de terrain : la multitude des organismes. Une structure complexe considérée comme un frein évident à l'accès au service public et à la santé au travail. Les rapporteurs proposent ainsi de regrouper l'Agence nationale pour les conditions de travail (Anact), l'Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP) et l'Institut national de recherche et de sécurité (INRS) au sein d'une structure nationale dédiée à la prévention en santé au travail, qui serait nommée France Santé au travail. Non par mesure d'économie, affiche-t-on, mais de rationalisation des moyens. L'un des enjeux majeurs de cette fusion est de créer une communauté de préventeurs. En complément de la mise en place d'une structure nationale, les auteurs du rapport considèrent que chaque entreprise doit pouvoir accéder par un guichet unique à une offre de service homogène. Celle-ci couvrirait l'intégralité des services auxquelles l'entreprise peut prétendre dans sa région. La structure régionale de prévention de droit privé, baptisée pour l'heure « Région Santé Travail », aurait pour mission la préservation de la santé au travail.

Une meilleure gestion des financements

C'est l'un des grands changements proposés dans ce rapport : centraliser l'ensemble des financements en matière de prévention. L'ensemble des ressources seraient récoltées au niveau national pour être ensuite ventilées au niveau régional. Les contributions financières aux services de santé au travail interentreprises (SSTI) et celles dédiées à l'OPPBTP pour les entreprises qui en relèvent pourraient être regroupées avec les cotisations accidents du travail/maladies professionnelles (AT-MP) au sein d'une cotisation unique « santé travail » directement recouvrée par les Urssaf. Ce système de cotisation unique permettrait, à coût global constant, pour l'ensemble des entreprises, de rendre visible par chacune d'entre elles, indépendamment de ses actions propres, la part de la contribution qu'elle consacre à la santé au travail et aux risques professionnels.

Renforcer la prévention par la formation

Actuellement, il peut exister des doublons au sein des équipes de préventeurs. C'est ce qui rendrait le système peu lisible. L'objectif serait dès lors de mieux répartir les expertises. En matière de formation des différents acteurs de la prévention, le rapport recommande de mettre en place un référentiel national de compétences en matière de pratiques de prévention, en fonction des métiers, des missions et du niveau de responsabilité exercé ; de formaliser l'ensemble du corpus théorique et méthodologique en matière de santé travail et le rendre accessible à l'ensemble des acteurs de la prévention sous forme pédagogique ; et enfin de prévoir un cursus de formation pour les futurs responsables des structures régionales. Les conclusions de ce rapport permettront d'alimenter les réunions bilatérales avec les partenaires sociaux en vue de l'élaboration d'un programme de travail en matière sociale. Des réunions de concertations doivent notamment être conduites par la ministre du Travail et la ministre de la Santé afin de préparer la transmission d'un document d'orientation. Le dépôt au Parlement avant la fin du premier semestre 2019 d'un projet de texte législatif pourra en découler.

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