La face cachée de l'industrie de la fleur

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Une campagne pour la promotion des fleurs équitables soutenue par la Commission européenne vient de débuter dans quatre pays européens dont l’Allemagne. Avec en ligne de mire, la face cachée de cette industrie : conditions de travail déplorables, usage abusif de pesticides et destruction de l’environnement. Les alternatives durables existent, notamment celle du Flower Label Program.

« Les conditions de travail dans les fermes florales ougandaises sont exécrables. On compte beaucoup d’accidents du travail. Une seule pause est permise à midi où le déjeuner doit se prendre dans les serres, c’est-à-dire là où on asperge les fleurs de pesticides. De toute façon, on ne tient pas compte des salariés pendant les périodes d’aspersion. Ils doivent continuer à travailler dans les serres – sans tenue de protection », rapporte le syndicaliste ougandais Stephen Baraza dans un rapport publié par l’organisation allemande Flower Label Program (FLP), coordinatrice de la campagne européenne « Des fleurs équitables pour les droits de l’homme ».

Un marché de 3 milliards d'euros en Allemagne

L’industrie de la fleur emploie environ 200 000 personnes de par le monde, deux tiers d’entre elles sont des femmes. En raison de conditions climatiques idéales pour la culture de la fleur, les fermes florales se trouvent dans les pays de la zone équatoriale, principalement en Colombie, en Equateur, au Kenya, en Ethiopie ou encore en Ouganda. Générateur de devises, pourvoyeur d’emplois dans des pays et régions souvent déshéritées, les gouvernements nationaux facilitent l’implantation de ces grandes exploitations. Quitte à fermer les yeux sur des conditions de travail scandaleux.

L’organisation FLP explique que les contrats écrits sont rares. Ce qui signifie emplois à court terme, salaires de misère, pas de liberté syndicale, licenciement abusif. Par ailleurs, la très forte exposition aux pesticides se révèle particulièrement fatale pour les femmes enceintes menacées de fausses couches. Quand ce n’est pas le système nerveux qui craque. « Nous faisons en sorte de minimiser l’usage et la quantité de pesticides dans la culture de la fleur », précise Silke Peters, de FLP. « Mais pour nous, il s’agit d’abord et avant tout d’améliorer les conditions de travail des personnes travaillant chez les producteurs de fleurs, notamment en exigeant des tenues de protection ».

La solution au problème se trouvant in fine dans les mains des consommateurs, FLP mène depuis plus de dix ans des campagnes de sensibilisation auprès des consommateurs allemands. De fait, ils dépensent chaque année trois milliards d’euros pour les fleurs, ce qui fait du marché allemand de la fleur le premier en Europe. Par ailleurs, le problème des résidus de pesticides dans les compositions florales fait l’objet depuis quelques années d’une couverture médiatique régulière en Allemagne. « Contrairement au secteur alimentaire, la loi n’impose pas de seuil limite pour les pesticides dans les fleurs », explique Manfred Krautter, de Greenpeace Allemagne. Pour minimiser les contacts avec les pesticides (par voie respiratoire ou par la peau), les organisations conseillent de se laver les mains après avoir manié des bouquets et de les tenir éloignés de toute nourriture.

La France, abonnée absente

FLP a la particularité de réunir sous le même toit des professionnels de la fleur (producteurs, grossistes, fleuristes) et des représentants d’organisations syndicales et de défense pour les droits de l’homme. Ensemble, ils ont défini les critères pour leur label de fleur équitable et assurent un suivi sur toute la chaîne de production : lorsqu’une ferme florale demande l’obtention du label FLP, des contrôleurs indépendants sont envoyés sur place pour examiner la situation et proposer les changements nécessaires. Que d’autres visites viendront confirmer ou pas. Ces fleurs FLP sont ensuite distribuées dans le réseau de distribution des grossistes et fleuristes, eux aussi certifiés FLP. Le consommateur n’est évidemment pas oublié puisqu’un moteur de recherche est mis à sa disposition pour trouver un fleuriste FLP dans son voisinage.

A ce jour, FLP répertorie 61 fermes florales certifiées FLP dans trois pays : l’Equateur, le Kenya et le Portugal. Ce qui représente en tout 15 000 salariés et une superficie de 1 500 hectares. C’est en Equateur et au Kenya que l’organisation FLP enregistre les améliorations les plus nettes. Organisation nationale, FLP s’associe également avec des partenaires européens pour promouvoir ces fleurs équitables par delà le Rhin. Or, Silke Peters regrette que le mouvement demeure encore quasi absent en France : « Nous sommes à la recherche d’un partenaire en France – que nous n’avons toujours pas trouvé ».

Auteur : Claire Stam à Francfort (Allemagne), Novethic

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