Chaque année, les incendies en milieu professionnel provoquent des arrêts d’activité, des pertes matérielles considérables… et parfois même des drames humains. En France, plus de 10 000 sinistres de ce type sont recensés annuellement, et environ 250 entraînent un arrêt de travail, dont 15 graves et 1 à 2 mortels (source : INRS).
Des chiffres alarmants, alors même que la réglementation impose des obligations précises en matière de prévention incendie.
Parmi elles, une mesure clé reste pourtant régulièrement ignorée ou mal appliquée : l’intégration des risques incendie dans le DUERP.
Et pourtant, ce document constitue la pierre angulaire de toute démarche de prévention cohérente.
Le DUERP : un document obligatoire, mais souvent incomplet
Le DUERP (Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels) est obligatoire dès le premier salarié. Il a pour objectif de recenser, analyser et hiérarchiser les risques auxquels sont exposés les salariés. À ce titre, il doit intégrer les risques liés à un incendie : sources de chaleur, matériaux inflammables, configuration des locaux, nature des activités, etc.
Mais dans les faits, de nombreux DUERP se révèlent incomplets ou obsolètes :
- Les risques incendie sont parfois absents du document,
- mal identifiés ou sous-évalués,
- ou non actualisés malgré des évolutions importantes (ajout de machines, aménagements, incidents…).
Ce décalage entre la réalité du terrain et ce qui est inscrit dans le DUERP peut avoir de lourdes conséquences.
Une responsabilité juridique bien réelle
Lorsque survient un accident en lien avec un risque non évalué ou mal anticipé, la responsabilité de l’employeur peut être engagée.
Et dans certains cas, la faute inexcusable est reconnue. Cela signifie que l’entreprise n’a pas pris les mesures nécessaires pour protéger ses salariés, alors qu’elle en avait ou aurait dû en avoir conscience.
Cette reconnaissance entraîne des conséquences :
- prise en charge majorée des indemnisations par la CPAM,
- réparation du préjudice moral et physique,
- sanctions financières,
- voire, dans certains cas, sanctions pénales.
Et cela, indépendamment des pertes matérielles ou des interruptions d’activité.
Un rappel sur les règles de mise à jour du DUERP
Depuis mars 2022, les entreprises doivent suivre des règles précises :
- Les entreprises de plus de 11 salariés sont tenues de mettre à jour leur DUERP au moins une fois par an.
- Celles de moins de 11 salariés doivent le faire :
- lorsqu’un aménagement important modifie les conditions de travail,
- ou lorsqu’une information nouvelle impacte l’évaluation des risques.
Chaque mise à jour doit logiquement conduire, si nécessaire, à la mise en place d’actions concrètes de prévention.
Le DUERP ne peut pas rester un document théorique ou figé.
Exemple de terrain : un risque sous-estimé
Dans une entreprise artisanale du secteur bois, un poêle d’appoint a été installé pour améliorer le confort hivernal des équipes.
Ce nouvel équipement a été placé à proximité de matériaux combustibles sans adaptation du plan de prévention.
Ni le DUERP ni les consignes d’évacuation n’ont été actualisés.
Quelques mois plus tard, un début d’incendie se déclare. Heureusement maîtrisé rapidement, mais l’épisode aurait pu avoir des conséquences bien plus lourdes.
Ce cas, loin d’être isolé, rappelle à quel point des situations banales peuvent devenir critiques lorsqu’elles ne sont pas formalisées.
Ce que révèle le diagnostic de terrain
De nombreuses entreprises disposent d’un DUERP uniquement parce qu’il est obligatoire, sans l’avoir réellement intégré dans une logique de gestion active des risques. Le simple fait d’ajouter une ligne « incendie » dans un tableau Excel ne suffit pas.
Il faut s’interroger sur :
- les sources potentielles de départ de feu,
- les mesures existantes (extincteurs, alarmes, EPI...),
- la réaction attendue des équipes,
- les consignes connues ou non,
- la désignation claire des responsabilités.
Un DUERP bien construit permet de déclencher les bonnes actions et de piloter une vraie démarche de prévention.
Les bons réflexes à adopter
Voici quelques points essentiels pour ne pas passer à côté d’obligations fondamentales :
- Vérifier que les risques incendie figurent bien dans le DUERP.
- Mettre à jour ce document dès que nécessaire (modifications, incidents, nouveaux équipements…).
- Formaliser des actions de prévention concrètes et les mettre en œuvre.
- Impliquer les équipes dans la démarche.
- Si besoin, faire appel à un expert externe ou à un IPRP.
Envie d’aller plus loin ?
Deux autres obligations incendie sont elles aussi souvent négligées par les entreprises :
- la formation des équipes à la lutte contre l’incendie
- et la réalisation régulière d’exercices d’évacuation
Découvrez-les dans notre article de blog : Trois obligations incendie que les entreprises négligent (et comment y remédier).
Un DUERP bien renseigné, une équipe formée et des exercices réguliers peuvent faire toute la différence en cas d’urgence.
Anticiper, c’est protéger : vos collaborateurs, vos locaux… et la continuité de votre activité.