Dans un contexte économique et réglementaire de plus en plus exigeant, la maîtrise des enjeux liés à la Sécurité, à la Santé et à l’Environnement (SSE) s’impose comme une priorité stratégique pour les entreprises industrielles.
Au-delà de la conformité, intégrer les dimensions SSE dans le pilotage global de l’entreprise devient un facteur différenciant. Le Référentiel MASE (Manuel d’Amélioration Sécurité des Entreprises), largement utilisé en France, propose une approche structurée pour accompagner cette transformation. Loin d’une simple démarche de certification, il s’agit d’un véritable cadre de management visant à aligner pratiques opérationnelles et culture de prévention.
Comprendre les origines et l’évolution du MASE
Créé dans les années 1990 à l’initiative de grandes entreprises industrielles, notamment dans la chimie et la pétrochimie, le MASE est né d’un besoin urgent de fiabiliser les interventions de sous-traitants sur des sites à haut risque. Son ambition initiale : améliorer la sécurité et prévenir les accidents dans les opérations multi-entreprises. Depuis, le référentiel a évolué pour s’appliquer à un éventail beaucoup plus large de secteurs (énergie, BTP, maintenance industrielle, transport, service etc.), tout en intégrant les attentes croissantes en matière de santé au travail, d’environnement, et de qualité du management opérationnel.
Le MASE n’est pas une norme ISO, mais il partage des similitudes dans son approche processus et dans son exigence de pilotage fondé sur l’amélioration continue. Il se distingue néanmoins par sa proximité avec les réalités de terrain, son ancrage dans les pratiques industrielles françaises, et sa structuration en cinq axes clairs, centrés sur l’efficacité opérationnelle et le comportement des acteurs.
Cinq axes structurants au service de la performance durable
Le référentiel MASE repose sur cinq grands piliers :
- Engagement de la direction : La direction joue un rôle moteur dans la définition des priorités SSE, l’allocation des ressources et l’exemplarité.
- Compétences et qualifications professionnelles : La maîtrise des risques passe par une gestion rigoureuse des compétences, de la formation et de la sensibilisation.
- Organisation du travail : Les pratiques doivent garantir un fonctionnement maîtrisé, avec des responsabilités bien définies et des procédures robustes.
- Efficacité du système de management SSE : L’entreprise doit démontrer sa capacité à planifier, suivre et évaluer ses performances SSE.
- Amélioration continue : Des outils (audits internes, retour d’expérience, indicateurs) permettent d’identifier les écarts, d’en tirer des enseignements et de progresser.
Ce cadre méthodique incite les entreprises à prendre du recul sur leur organisation, à structurer leurs pratiques et à développer une culture partagée de la prévention.
Pourquoi s’engager dans une démarche MASE aujourd’hui ?
À première vue, la mise en œuvre du MASE peut sembler être une contrainte administrative supplémentaire. En réalité, de nombreuses entreprises engagées dans cette démarche en retirent des bénéfices tangibles, bien au-delà de l’obtention du certificat.
1. Réduction mesurable des incidents et accidents
Les entreprises certifiées MASE observent généralement une baisse significative des accidents du travail et des presqu’accidents. Cela s’explique par la mise en place de règles de fonctionnement claires, la responsabilisation accrue des équipes, et la rigueur dans l’analyse des situations à risque. La fiabilité accrue des opérations se traduit aussi par une meilleure maîtrise des délais, des coûts et de la qualité.
2. Renforcement de la confiance des donneurs d’ordres
Dans de nombreux secteurs industriels, la certification MASE est devenue un prérequis pour accéder à certains marchés ou répondre à des appels d’offres. Elle agit comme un label de confiance, attestant d’une capacité à intervenir dans des environnements sensibles. Elle constitue également un argument différenciateur dans un contexte de plus en plus concurrentiel.
3. Décloisonnement entre les fonctions opérationnelles et SSE
Le MASE invite à intégrer la dimension santé, sécurité et environnement dans les processus de pilotage quotidiens. Il favorise la transversalité entre les fonctions HSE, RH, production et maintenance. Ce décloisonnement améliore la coordination, l’appropriation des enjeux SSE par tous, et la pertinence des actions de prévention.
4. Structuration managériale
Enfin, le MASE agit comme un catalyseur de structuration : clarification des rôles, cartographie des processus, formalisation des retours d’expérience, développement d’indicateurs, etc. Il accompagne les entreprises dans la professionnalisation de leur management, souvent au bénéfice d’autres volets de leur performance (QVT, innovation, satisfaction client...).
Un processus d’amélioration continue plus qu’une simple certification
Contrairement à certaines approches ponctuelles, la démarche MASE repose sur un cycle d’amélioration continue : diagnostic, mise en œuvre, audit, réévaluation. Elle engage durablement l’entreprise dans un processus de transformation progressive.
Le diagnostic initial permet de mesurer l’écart entre les pratiques en place et les attendus du référentiel. C’est un outil d’objectivation utile pour prioriser les actions. Vient ensuite une phase de mise en œuvre, durant laquelle l’entreprise construit (ou ajuste) ses processus internes : rédaction des procédures, planification des formations, définition des indicateurs, organisation des retours d’expérience, etc.
L’audit de certification initial, réalisé par un organisme agréé, permet de valider la conformité du système mis en place. La certification est ensuite renouvelée tous les un à trois ans, selon la maturité du système, avec des audits de suivi réguliers.
Plus qu’une fin en soi, cette certification constitue un cadre d’auto-évaluation régulier, qui pousse les entreprises à s’interroger sur leurs pratiques, à formaliser leurs apprentissages et à systématiser leur progression.
MASE et autres référentiels : quelle complémentarité ?
La certification MASE peut être articulée avec d’autres démarches qualité ou SSE (ISO 45001, ISO 14001, ISO 9001, etc.). Bien que leurs logiques puissent différer, ces référentiels partagent une base commune autour du principe PDCA (Plan – Do – Check – Act).
De nombreuses entreprises choisissent de bâtir un système intégré, en combinant les exigences de plusieurs référentiels. Le MASE, avec son approche très opérationnelle, constitue alors un socle utile pour faire vivre concrètement la culture SSE sur le terrain, tandis que les référentiels ISO apportent un cadre plus normatif et internationalisé.
Un vecteur de transformation culturelle
Au-delà des outils et procédures, le principal enjeu du MASE est de faire évoluer les comportements. Une démarche SSE ne peut produire d’effets durables que si elle est portée par tous, à tous les niveaux hiérarchiques. Cela suppose de renforcer l’engagement des managers, de reconnaître les bonnes pratiques, de favoriser les retours d’expérience, et de donner aux salariés les moyens de signaler les risques sans crainte.
Le MASE agit ainsi comme un révélateur de la maturité organisationnelle : il met en lumière les forces et les fragilités d’une entreprise, et offre des leviers concrets pour installer une culture de vigilance partagée.
Conclusion
Le référentiel MASE dépasse largement le cadre d’une simple certification. Il constitue un véritable levier stratégique pour structurer les démarches de prévention, améliorer la performance globale et renforcer la résilience organisationnelle. Dans un monde où les attentes sociales, environnementales et réglementaires sont en constante évolution, les entreprises qui s’engagent sincèrement dans cette voie disposent d’un avantage compétitif durable.
Auteur : Candice MORELLON, AEGIDE INTERNATIONAL.