Posture, muscles et travail sédentaire : le vrai tabou qui pèse sur votre dos

Classé dans la catégorie : Risques pour l'Homme au travail

Un dos droit.
Les épaules alignées.
La tête haute, le ventre rentré.
Voilà l’image que beaucoup associent à la “bonne posture”. On la retrouve sur les affiches de prévention, dans les formations “gestes et postures”, et parfois même dans les recommandations de santé.

Et si je vous lançais un défi ?
Tenez cette posture, sans bouger, pendant une minute.
60, 59, 58… puis zéro.

Alors, comment vous sentez-vous ?
Si cela vous a semblé inconfortable ou difficile à maintenir, rassurez-vous : c’est normal.

Parce que la posture parfaite… n’existe pas.

Le mythe de la posture parfaite

On croit souvent que les douleurs de dos viennent d’une “mauvaise posture”. Comme si le secret consistait simplement à se tenir droit. Mais la science nous montre une réalité plus complexe.

  • Nous ne sommes pas tous faits pareil : morphologie, force musculaire, fatigue, âge… deux collaborateurs assis au même bureau ne se tiendront jamais de la même façon.
  • Nous ne sommes pas constants : selon l’heure, le stress ou le sommeil, notre posture varie.
  • Et surtout : la posture est largement inconsciente. Comme la respiration, elle est gérée automatiquement par le système nerveux.

Miser uniquement sur la volonté pour “bien se tenir” est voué à l’échec.

Le vrai problème : un corps qui vit en avant

Derrière le mythe de la posture parfaite se cache un tabou encore plus important : le déséquilibre musculaire.

Les muscles de l’avant (chaîne antérieure) : abdominaux, pectoraux et fléchisseurs de hanche sont sollicités dès la naissance. Ils nous servent à attraper, ramper, tenir assis, avancer.

Dans nos vies modernes, ils sont encore plus renforcés : taper sur un clavier, consulter un smartphone, conduire, cuisiner, tout se passe devant nous.

Les muscles de l’arrière (chaîne postérieure) : extenseurs lombaires, muscles para-vertébraux, érecteurs du rachis et fessiers sont essentiels pour stabiliser notre posture mais ils ne se développent pleinement qu’à partir de la petite enfance, lorsque nous apprenons à nous redresser et à marcher.

Plus tard, avec la sédentarité, le temps passé assis et l’âge, ils s’affaiblissent, se relâchent et perdent en qualité.

Résultat ?
Un déséquilibre croissant : l’avant domine, l’arrière décroche.
Et c’est le dos qui encaisse.

Ce que dit la science

Plusieurs études éclairent ce phénomène.

  • Sportifs vs non sportifs : une étude comparant la force du tronc a montré que les athlètes ont des extenseurs lombaires bien plus puissants que les sédentaires, alors que la force des muscles fléchisseurs (chaîne antérieure) ne varie pas autant. En clair : c’est l’arrière qui fait la différence.
  • Avec l’âge : d’autres recherches démontrent que les extenseurs lombaires perdent en force et en endurance dès la quarantaine, avec un déclin plus rapide chez les femmes. La qualité musculaire se dégrade (infiltration de graisse intramusculaire), la mobilité d’extension diminue et la gravité accentue la tendance au dos voûté.
  • Sarcopénie et colonne : des modèles biomécaniques montrent que lorsque la masse musculaire postérieure diminue, la colonne subit davantage de charges de compression et de cisaillement. Autrement dit : moins de muscle, plus de contraintes sur les disques et ligaments.

Traduction simple : plus on vit assis et en avant, moins on entretient la chaîne postérieure, plus notre dos devient vulnérable.

Conséquences pour les salariés et les entreprises

Dans la vie quotidienne, ce déséquilibre se traduit par :

  • Douleurs lombaires ou cervicales,
  • Raideur et fatigue en position assise,
  • Perte de mobilité.

Mais en entreprise, l’impact va au-delà de la douleur.

Un collaborateur qui souffre ne s’absente pas toujours. Il est là, assis devant son écran, mais son énergie est accaparée par son inconfort. Sa concentration diminue, ses performances baissent.

C’est ce qu’on appelle le présentéisme : être présent physiquement mais moins efficace à cause de la douleur ou de la fatigue.

L’INRS rappelle que le présentéisme coûte plus cher que l’absentéisme, parce qu’il touche la productivité sur le long terme. Et selon une étude Malakoff Humanis (2023), plus d’un tiers des salariés français déclarent travailler malgré un problème de santé qui aurait justifié un arrêt.

Autrement dit : le mal de dos lié à la sédentarité n’est pas seulement une question de confort individuel. C’est un véritable enjeu de performance collective.

La solution : remettre du mouvement, mais le bon

Puisque le problème n’est pas une “mauvaise posture”, mais un déséquilibre musculaire, la solution n’est pas de se figer droit, mais de réentraîner l’arrière du corps.

Comment ?
En réveillant les muscles profonds et en restaurant la coordination entre l’avant et l’arrière.
Les recherches récentes montrent l’efficacité d’exercices inspirés de la motricité infantile :

  • La quadrupédie (se déplacer à quatre pattes),
  • Le “bird-dog” (en appui au sol, lever un bras et la jambe opposée),
  • Le crawling (ramper, un peu comme à l’armée).

Ces mouvements simples, peu contraignants, stimulent fortement les stabilisateurs du tronc et les fessiers. Ils redonnent tonicité, endurance et proprioception à la chaîne postérieure.

Au bureau, cela se traduit par des pauses actives ciblées : 2 à 3 minutes pour bouger autrement, sortir de l’immobilité et rééquilibrer ses chaînes musculaires.

Routine express “anti-posture figée” spéciale bureau

  • Auto-grandissement assis ou debout – 30 secondes
    Asseyez-vous au bord de la chaise (ou restez debout), imaginez un fil qui tire le sommet de votre tête vers le plafond. Rentrez légèrement le menton. Respirez profondément.
    Objectif : réveiller les muscles profonds qui soutiennent la colonne.
  • Ouverture thoracique – 5 répétitions
    Debout, mains croisées derrière la tête. Inspirez et ouvrez largement les coudes vers l’arrière, en rentrant légèrement le menton. Expirez en revenant.
    Objectif : lutter contre l’enroulement des épaules et redonner de la mobilité à la cage thoracique.
  • Rotations épaules/nuque – 3 répétitions par côté
    Debout, relâchez les bras le long du corps. Roulez lentement les épaules vers l’arrière en dessinant de grands cercles. Puis tournez doucement la tête à gauche, puis à droite, en respirant profondément.
    Objectif : relâcher les tensions cervicales et améliorer la circulation.
  • Flexion-extension debout – 5 répétitions
    Debout, mains sur les hanches, basculez doucement le bassin en avant (dos cambré, regard au plafond), puis en arrière (dos arrondi). Gardez les genoux légèrement fléchis.
    Objectif : réactiver les extenseurs lombaires et contrer la position assise prolongée.
  • Mini-squat dynamique – 10 répétitions
    Debout, pieds écartés largeur des hanches, fléchissez légèrement les genoux comme pour vous asseoir, puis remontez en poussant dans vos talons.
    Objectif : activer la chaîne postérieure (fessiers, lombaires) et stimuler la circulation sanguine.

Le rôle des managers et préventeurs

Comme dans une équipe sportive, la prévention ne repose pas uniquement sur l’individu.
Les managers et les préventeurs peuvent agir comme des entraîneurs en :

  • Intégrant des rappels visuels (infographies, pictogrammes),
  • Organisant des temps collectifs de sensibilisation,
  • Valorisant les pauses actives,
  • Créant un cadre qui promeut le mouvement plutôt que l’immobilité.

Ces actions renforcent la santé durable, diminuent les douleurs, améliorent la concentration et la performance collective.

Conclusion

La posture parfaite est un mythe. Le vrai problème, ce n’est pas que vous vous “tenez mal”, c’est que vos muscles de l’arrière ne travaillent plus assez.
Au bureau, derrière un écran, vous vivez en avant. Votre chaîne antérieure domine, votre chaîne postérieure s’endort, et votre dos encaisse.

La solution n’est pas de se redresser de force, mais de remettre du mouvement intelligent dans la journée de travail.

Des micro-routines, des pauses actives, un entraînement adapté de la chaîne postérieure.

C’est exactement la philosophie que nous portons chez Neomove : transformer le mouvement en réflexe naturel, simple et utile.
Parce qu’un collaborateur qui bouge mieux, c’est un collaborateur qui travaille mieux… et surtout, qui vit mieux.

Références

  • Santé publique France (2024). Troubles musculo-squelettiques en France : où en est-on ?
  • INRS. TMS : démarche de prévention.
  • https://www.inrs.fr/risques/tms-troubles-musculosquelettiques/prevention.html
  • Malakoff Humanis (2023). Baromètre santé et qualité de vie au travail.
  • Ariga, A. & Lleras, A. (2011). Brief and rare mental “breaks” keep you focused. Cognition, 118(3), 439–443.
  • Albulescu, P. et al. (2022). “Give me a break!” A systematic review and meta-analysis on the efficacy of micro-breaks. PLOS ONE.
  • Buxton JD et al. (2022). The effects of a novel quadrupedal movement training on physical function. J Strength Cond Res.
  • Yoon TL et al. (2015). Trunk muscle activation during different quadruped stabilization exercises. J Phys Ther Sci.

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