La plasturgie se tourne vers l’avenir

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C’est un secteur qui se réinvente. Portée par la construction, l’alimentaire, l’automobile et les produits électriques et électroniques, la plasturgie doit faire face aux préoccupations écologiques et à un durcissement réglementaire qui ont contribué au développement du recyclage et de l’éco-conception. Aujourd’hui, nombre d’industriels gèrent en parallèle ressource vierge et ressource recyclée. De nouvelles technologies, telles que la fabrication additive, s’invitent dans le jeu. La production et les organisations du travail évoluent. Explications.

En 2019, La production mondiale de matières plastiques a atteint le niveau record de 368 millions de tonnes (source PlasticsEurope), tirée par la Chine et l’Amérique du Nord. Si la part européenne recule, le vieux continent prend de l’avance sur l’économie circulaire des plastiques. C’est loin d’être un détail. La pollution plastique est en effet devenue un souci environnemental majeur. Dans le viseur, notamment, les plastiques à usage unique ou les pratiques de suremballage. L’avenir qui se dessine aujourd’hui privilégie les matières durables, recyclées, réclamées d’ailleurs par les clients. La plasturgie française est représentée par 3 500 entreprises (dont plus de la moitié ont moins de 10 salariés), 122 000 emplois, 30,2 milliards de chiffre d’affaires en 2018 (source : Fédération de la plasturgie et des composites). Cette profession a publié le 23 avril 2018 sa feuille de route sur l’économie circulaire. Elle fixe l’objectif de 100 % de plastique recyclé en 2025 et, grâce à ce recyclage, une réduction des gaz à effet de serre à hauteur de 8 millions de tonnes de CO2. La loi anti-gaspillage et économie circulaire (Agec) du 10 février 2020 a étendu la responsabilité élargie du producteur à de nouvelles filières et prévoit l’interdiction des plastiques à usage unique d’ici 2040 et la fin de certains produits consommables. Une réorganisation de la profession s’est amorcée dans le but d’incorporer plus de matières plastiques recyclées (MPR) et de changer les modèles de production et de consommation. Des facteurs externes peuvent ralentir cette démarche. Par exemple, en 2020, la crise a fait chuter le prix du baril de brut, entraînant mécaniquement une chute du prix des résines vierges qui inquiète les producteurs de MPR.

Nouveaux modes de production, nouveaux risques

D’après le Syndicat national des régénérateurs de matières plastiques, en 2018, 436 000 tonnes de matières recyclées ont été produites en France. Et 389 000 tonnes utilisées, selon les déclarations des transformateurs. 99 % des MPR sont aujourd’hui produites par recyclage mécanique, qui intègre des opérations de régénération (tri, lavage, décontamination, broyage, reformation de granulés), afin de récupérer les polymères présents dans les objets traités. La voie du recyclage chimique, permettant de revenir au polymère pur, se développe également pour certains polymères spécifiques non recyclables mécaniquement. Elle offre notamment des perspectives dans l’emballage alimentaire. En termes de risques professionnels, l’introduction de MPR pose deux questions. Tout d’abord celle de leur qualité et de leur provenance, car elles pourraient être polluées par des additifs interdits en France. La mise en place de contrôles et l’accès aux données sur les formulations est nécessaire. L’autre point de vigilance concerne les produits chimiques avec lesquels le plastique a été en contact lors de sa première vie car ils peuvent représenter un danger pour les salariés de l’industrie du recyclage. Pour le développement de solutions durables, certains plasturgistes nouent des partenariats avec leurs fournisseurs. L’enjeu consiste aussi à lever les doutes sur la qualité d’un produit réalisé à partir de déchets.

La chimie omniprésente

Si les plasturgistes se considèrent plus comme des industriels que comme des chimistes, la chimie est omniprésente dans la profession. Constituées de polymères et d’additifs, les matières plastiques se répartissent entre deux catégories. Les thermoplastiques, déformables et façonnables à chaud, peuvent être refondus et recyclés. Les procédés utilisés pour leur fabrication sont souvent automatisés et permettent de produire en série. Citons le polyéthylène, le polypropylène, le polychlorure de vinyle, le polystyrène, le polyéthylène téréphtalate… Deuxième catégorie, les thermodurcissables sont synthétisés par une réaction chimique qui donne un produit fini non déformable à chaud, avec des caractéristiques physico-chimiques généralement supérieures aux thermoplastiques. On peut citer le polyester stratifié pour la fabrication des piscines, les polyuréthannes, les polyépoxydes. Les matières premières thermoplastiques mises en œuvre en plasturgie ne sont la plupart du temps pas étiquetées comme des agents chimiques dangereux. Néanmoins, elles subissent une transformation thermique au cours de laquelle il peut y avoir des émissions de produits de dégradation ou des produits initiaux (additifs, monomères…) à un niveau en général faible mais en nombre important. Même s’il est difficile d’identifier l’agent chimique responsable, des cas d’irritation et des effets respiratoires ont été rapportés. Ces situations professionnelles doivent donc être regardées sous l’angle des poly-expositions. Dans la fabrication des thermodurcissables, qui peut faire appel à des procédés manuels, l’exposition à des substances dangereuses, en particulier aux précurseurs du polymère final, est importante à toutes les étapes. Faire l’inventaire des produits utilisés est indispensable. Parfois, la substitution de certains par des produits moins dangereux peut être envisagée. En deuxième ressort, la priorité doit être donnée aux mesures de protection collective : adapter les équipements pour permettre l’isolation du procédé ou le captage des polluants à la source, ventiler les zones de travail et de stockage, adapter les procédures de nettoyage des machines… Ces solutions sont aussi valables pour la transformation des thermoplastiques.

D’autres risques industriels

De nombreux autres risques industriels doivent également être évalués. Les machines peuvent générer du bruit. L’utilisation de solvants inflammables et de matières plastiques pouvant être de bons combustibles nécessite la prise en compte du risque d’incendie-explosion. Des dispositions peuvent être prises : préférer les granulés à la poudre pour la matière première, limiter les températures de chauffe, capter les émissions, prévoir du matériel Atex dans les zones identifiées… Enfin, les gestes répétitifs et les manutentions de charges lourdes peuvent être nombreux, notamment au cours des phases d’approvisionnement en matières premières. La moitié des accidents survenant en plasturgie sont liés aux manutentions manuelles et 90 % des maladies professionnelles sont des affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail. L’aménagement des postes de travail, en associant les salariés concernés, tout comme l’utilisation d’aides à manutention, ne doivent par conséquent pas être négligés.

Les promesses de la fabrication additive

Le secteur de la plasturgie est également marqué par l’essor de nouvelles technologies telles Ainsi, la fabrication additive ou impression 3D permet la production rapide de prototypes pour accélérer l’innovation industrielle, et ouvre également la voie à la production de petites séries, sans moule d’injection. Un questionnement sur les risques associés à la fabrication additive plastique a émergé, en particulier du fait des émissions de composés volatils dangereux et de nanoparticules. Des solutions de prévention se développent : prévoir un local non occupé dédié à ces travaux, utiliser un système d’encoffrement, de captage et de filtration efficace des polluants, aérer les lieux de travail et/ou prévoir une ventilation adéquate… Comme pour les risques chimiques en général, les principes généraux de prévention s’appliquent.

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