De nombreux secteurs d'activité utilisent des agents biologiques pathogènes pour l'homme. Ainsi, dans les entreprises concernées, l'employeur doit mettre en place une démarche de prévention du risque biologique.
Dans ce guide complet, retrouvez l'essentiel de la réglementation pour la prévention du risque biologique en entreprise !
Prévention du risque biologique : définition et enjeux
Qu'est-ce qu'un agent biologique ?
Le Code du travail considère comme agent biologique tous les micro-organismes, les cultures cellulaires et les endoparasites humains susceptibles de provoquer une infection, une allergie ou une intoxication des travailleurs (Article R4421-2 C.trav.).
Il s'agit de ce que l'on appelle communément les « microbes ». Ils sont invisibles à l'œil nu et peuvent provoquer des maladies chez l'homme.
Il existe plusieurs types d'agents biologiques tels que les bactéries, les endoparasites, les virus, les champignons microscopiques, etc.
Les agents biologiques peuvent être présents sur un homme, un animal et sur les déchets et fluides qu'ils produisent (urine, excréments, sang, etc.) ainsi que dans l'environnement (l'eau, le sol, les déchets en tout genre, etc.).
Les agents biologiques sont classés en quatre groupes en fonction de leur dangerosité pour l'homme (Article R4421-3 C.trav.) :
- Le groupe 1 comprend les agents biologiques non susceptibles de provoquer une maladie chez l'homme ;
- Le groupe 2 comprend les agents biologiques pouvant provoquer une maladie dangereuse pour l'homme mais pour laquelle il existe généralement un traitement efficace et dont la propagation dans la collectivité est peu probable ;
- Le groupe 3 comprend les agents biologiques pouvant provoquer une maladie grave chez l'homme et dont la propagation dans la collectivité est possible mais pour lesquels il existe généralement un traitement efficace ;
- Le groupe 4 comprend les agents biologiques qui provoquent des maladies graves chez l'homme et dont la propagation dans la collectivité est élevée et pour lesquels il n'existe ni prophylaxie ni traitements efficaces.
Ainsi, seuls les agents biologiques des groupes 2, 3 et 4 sont considérés comme des agents biologiques pathogènes représentant un danger pour les travailleurs (Article R4421-4 C.trav.).
Documentation: Pour vérifier la dangerosité d'un agent biologique, n'hésitez pas à consulter l'Arrêté du 16 novembre 2021 fixant la liste des agents biologiques pathogènes.
Qu'est-ce que le risque biologique ?
Le risque biologique expose les travailleurs à une potentielle contamination par des agents biologiques pathogènes qui peuvent provoquer des maladies parfois très graves chez l'homme.
La contamination par un agent biologique pathogène représente un réel danger pour la santé et la sécurité des travailleurs ainsi que pour la collectivité si la maladie se répand dans la population.
Les travailleurs peuvent être contaminés de plusieurs façons à un agent biologique et notamment :
- par voie respiratoire ;
- par voie digestive ;
- par contact avec la peau ou les muqueuses ;
- par inoculation.
L'exposition des travailleurs au risque biologique peut être due soit à une utilisation délibérée d'agents biologique par l'entreprise (comme dans un laboratoire pharmaceutique) soit à la présence d'agents biologiques dans l'environnement de travail (comme dans les hôpitaux).
Ainsi, de nombreux secteurs d'activité sont concernés par le risque biologique :
- le secteur de la santé (hôpitaux, aides à domicile, etc.) ;
- le secteur pharmaceutique (laboratoires, biotechnologies, etc.) ;
- le secteur agricole (éleveurs, agriculteurs, etc.) ;
- le secteur du traitement des déchets (éboueurs, centres de tri des déchets, etc.) ;
- etc.
Quels sont les enjeux du risque biologique ?
Le risque biologique peut être très dangereux pour les travailleurs et provoquer des infections, des allergies, des intoxications, voire des cancers.
En fonction de l'agent biologique pathogène en cause, les travailleurs peuvent éprouver de nombreux symptômes tels que des irritations cutanées, de la fièvre, une pneumonie, des complications cardiaques, etc.
Par ailleurs, comme nous l'avons évoqué plus haut, le risque biologique peut entraîner une épidémie en propageant la maladie dans la collectivité et particulièrement lorsque des agents biologiques des groupes 3 et 4 sont impliqués.
Notez-le: De nombreuses maladies relatives au risque infectieux sont reconnues comme étant des maladies professionnelles. C'est également le cas pour certaines allergies et intoxications ou pour le risque cancérogène relatif aux hépatites.
Travailleurs à risques particuliers
Pour limiter l'exposition des travailleurs les plus vulnérables, il est interdit d'exposer une femme enceinte au virus de la rubéole ou au toxoplasme à moins qu'elle ne soit protégée contre ces agents biologiques par son état d'immunité (Article D4152-3 C.trav.).
Il est également interdit d'affecter les jeunes à des travaux les exposant aux agents biologiques de groupe 3 ou 4 (Article D4153-19 C.trav.).
Comment prévenir le risque biologique ?
Pour prévenir le risque biologique, l'employeur doit respecter les principes généraux de prévention des risques et notamment (Article R4422-1 C.trav.) :
- éviter l'utilisation d'un agent biologique dangereux en le remplaçant par un autre moins dangereux lorsque cela est possible (Article R4424-1 C.trav.) ;
- évaluer le risque biologique ;
- agir à la source et sur le « réservoir » d'agents biologiques ;
- utiliser des équipements et des méthodes de travail adaptés en tenant compte de l'évolution technique.
Évaluation du risque biologique
L'employeur doit d'abord identifier et évaluer la présence potentielle ou réelle d'agents biologiques dans son entreprise puis définir les caractéristiques de ces agents telles que le mode de transmission ou la dangerosité pour l'homme.
En effet, l'évaluation des risques biologique doit être réalisée en fonction du groupe auquel appartient l'agent biologique et selon les maladies professionnelles que cet agent provoque (Article R4423-2 C.trav.). L'employeur doit également tenir compte de toutes les informations disponibles sur les effets néfastes des agents biologiques identifiés.
En fonction de l'activité de l'entreprise, il existe de nombreuses sources ou réservoirs potentiels d'agents biologiques tels que des patients malades, des échantillons de laboratoire, des déchets, un élevage d'animaux, un réservoir d'eau contaminé, etc.
Par ailleurs, l'employeur doit porter une attention particulière aux agents biologiques présents dans l'organisme des patients, des animaux et les déchets qui en proviennent (échantillon ou prélèvement) (Article R4423-3 C.trav.).
Ensuite, l'employeur doit identifier les activités qui exposent les travailleurs et déterminer la nature, la durée et les conditions de l'exposition des travailleurs à ces agents biologiques (Article R4423-1 C.trav .).
Lorsque les travailleurs sont exposés à plusieurs agents biologiques appartenant à des groupes différents, l'employeur doit analyser les risques pour chacune de ces expositions.
Focus: Les agents biologiques étant invisibles à l'œil nu, leur transmission à l'homme peut être très difficile à déceler. Des gestes qui peuvent paraître anodins au quotidien sont susceptibles de contaminer un homme, par exemple :
- inhaler un air contaminé par des gouttelettes de salive d'un patient malade ;
- porter des mains contaminées à la bouche (en mangeant par exemple) ;
- se couper avec un objet contaminé ;
- etc.
Une fois l'évaluation des risques réalisée, l'employeur doit fournir à tous les travailleurs exposés à des agents biologiques pathogènes les informations suivantes (Article R4425-4 C.trav.) :
- les activités au cours desquelles les travailleurs sont exposés à des agents biologiques pathogènes, les procédures, les méthodes de travail et les mesures et moyens de protection et de prévention correspondants ;
- le nombre de travailleurs exposés ;
- le nom et l'adresse du médecin du travail ;
- le nom de la personne chargé d'assurer la sécurité sur le lieu de travail ;
- un plan d'urgence pour la protection des travailleurs contre l'exposition aux agents biologiques des groupes 3 ou 4 en cas de défaillance du confinement physique.
Documentation: Pour évaluer le risque biologique, n'hésitez pas à consulter l'outil d'évaluation des risques biologiques mis à disposition par l'Institut de recherche et de sécurité (INRS).
Déclaration d'utilisation d'agents biologiques pathogènes
Lorsque l'évaluation des risques est réalisée, la première utilisation d'agents biologiques pathogènes doit être déclarée à l'agent de contrôle de l'inspection du travail au moins trente jours avant le début des travaux. Elle doit être renouvelée chaque fois qu'un changement important des procédés le justifie.
Cette déclaration doit mentionner (Article R4427-2 C. trav.) :
- la dénomination et le siège social de l'entreprise et l'adresse de l'établissement ;
- le nom et l'adresse du médecin du travail ;
- le nom et la qualité du responsable sécurité, s'il existe, sur le lieu de travail ;
- le résultat de l'évaluation des risques d'exposition à des agents biologiques ;
- l'espèce ou, à défaut, le genre auquel appartient chaque agent biologique concerné ;
- les mesures de protection et de prévention envisagées.
Quelles sont les mesures de prévention pour le risque biologique ?
Lorsque l'exposition des travailleurs à un agent biologique dangereux ne peut pas être évitée, elle doit être réduite au minimum par la mise en place des mesures de prévention suivantes (Article R4424-3 C.trav.) :
- limiter le nombre de travailleurs exposés ;
- utiliser des processus de travail, des contrôles techniques ou des mesures de confinement pour éviter ou minimiser la dissémination d'agents biologiques (nettoyage et ventilation des locaux, désinfection du matériel, isolation des individus contaminés, etc.) ;
- mettre en place une signalisation appropriée ;
- mettre en place des mesures de protection collective ou des mesures de protection individuelle (encoffrement des postes de travail, rangement systématique des EPI, etc.) ;
- fournir aux travailleurs des moyens de protection individuelle (notamment des vêtements de protection appropriés) et des installations sanitaires appropriées (Article R4424-5 C.trav.) ;
- mettre en place des mesures d'hygiène (lavage de mains systématique, changement de vêtements après le travail, etc.) ;
- établir un plan et des mesures en cas d'accidents impliquant des agents biologiques pathogènes ;
- utiliser des moyens de détection d'agents biologiques pathogènes ;
- mettre en place des procédures de tri, de collecte, de stockage, de transport et d'élimination des déchets (tels que des récipients sûrs et identifiables) ;
- mettre en place des mesures sans risques de transport et de manipulation des agents biologiques pathogènes.
Attention : Les moyens de protection individuelle contre les agents biologiques pathogènes non réutilisables doivent être considérés comme des déchets contaminés (Article R4424-6 C.trav.).
Consignes de sécurité et mesures sanitaires
L'employeur doit fournir des instructions écrites sur la procédure à suivre en cas d'accident ou d'incident grave mettant en cause un agent biologique pathogène et pour la manipulation d'agents biologiques du groupe 4 (notamment concernant son élimination) (Article R4425-1 C.trav.).
Par ailleurs, l'employeur doit également établir une consigne de sécurité pour interdire dans les lieux de travail où existe un risque de contamination : la nourriture, les boissons, les articles pour fumeurs, les cosmétiques et les mouchoirs réutilisables (Article R4424-4 C.trav.). Seuls les mouchoirs en papier sont autorisés et doivent être éliminés comme des déchets contaminés.
Enfin, l'employeur doit également rappeler aux travailleurs (notamment par le règlement intérieur s'il existe) leur obligation de signaler immédiatement tout accident ou incident mettant en cause un agent biologique pathogène (Article R4425-3 C.trav.).
Attention : En cas d'accident, les travailleurs et le comité social et économique (CSE) doivent être informés sans délai (Article R4425-2 C.trav.).
Formation des travailleurs
Afin de prévenir au mieux le risque biologique, les travailleurs doivent suivre une formation à la sécurité avant toute activité impliquant des agents biologiques. Cette formation doit porter au minimum sur (Article R4425-6 C.trav.) :
- les risques pour la santé ;
- les prescriptions en matière d'hygiène ;
- les précautions à prendre pour éviter l'exposition ;
- le port et l'utilisation des équipements et des vêtements de protection individuelle ;
- les modalités de tri, de collecte, de stockage, de transport et d'élimination des déchets ;
- les mesures à prendre pour prévenir ou pallier les incidents ;
- la procédure à suivre en cas d'accident.
Suivi médical
Les travailleurs exposés à des agents biologiques du groupe 3 ou 4 bénéficient d'un suivi médical renforcé (SIR) qui comprend notamment un examen médical d'aptitude à l'embauche ainsi qu'une surveillance post-exposition ou post-professionnelle (Article R4426-7 C.trav.).
Pour cela, le médecin du travail doit disposer d'une liste des travailleurs exposés mentionnant le type de travail réalisé et, lorsque c'est possible, l'agent biologique impliqué.
Focus: La liste des travailleurs exposés doit être conservée au moins dix ans ou aussi longtemps que la période d'incubation d'une maladie potentielle l'exige.
Pour les travailleurs exposés aux agents biologiques des groupes 1 ou 2, la visite d'information et de prévention (VIP) initiale doit impérativement être réalisée avant l'affectation au poste.
Enfin, un dossier médical doit être constitué pour chaque travailleur susceptible d'être exposé à des agents biologiques pathogènes (Article R4426-8 C.trav.).
Surveillance des maladies
Afin de prévenir les risques de contamination de la collectivité, le médecin du travail doit être informé par l'employeur des absences pour cause de maladie des travailleurs exposés à des agents biologiques pathogènes (lorsque ces absences dépassent les délais normaux) ainsi que des décès de ces travailleurs (Article R4426-12 C.trav.).
Quelle est la responsabilité de l'employeur ?
En cas d'accident impliquant un agent biologique pathogène ou de manquement aux obligations de sécurité, l'employeur peut être reconnu responsable civilement ou pénalement.
La responsabilité civile de l'employeur peut être engagée lorsque celui-ci a commis une faute inexcusable. La faute inexcusable de l'employeur peut être reconnue :
☑️ ️absence, insuffisance ou défaut des mesures de prévention des risques (Cass, crim,11 juin 2014, 13-85.601) ;
☑️ ️méconnaissance du danger (Cass, civ, 20 décembre 2018, 17-28.148).
Par ailleurs, la responsabilité pénale de l'employeur peut également être engagée dans le cas d'une violation d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement :
☑️ ️la mise en danger d'autrui (Article 121-3 C. pén.) ;
☑️ ️le fait de causer des blessures sur autrui (Article 222-20 C.pén.) ;
☑️ ️le fait de causer la mort d'autrui (Article 221-6 C.pén.).
Ce qu'il faut retenir
☝️ Les agents biologiques pathogènes sont des micro-organismes qui peuvent provoquer des maladies chez l'homme ;
☝️ Les agents biologiques sont classés en 4 groupes selon leur dangerosité ;
☝️️ L'évaluation du risque biologique doit être réalisée en fonction de l'agent biologique présent et en fonction de la maladie qu'il provoque ;
☝️ ️L'employeur doit limiter risque biologique au minimum grâce à des processus de travail adaptés et des mesures de confinement ;
☝️ ️Les travailleurs exposés au risque biologique bénéficient d'une formation adaptée et d'un suivi individuel renforcé de leur état de santé.