La conséquence sur le plan des risques professionnels et de l'homme au travail a été l'augmentation des risques dits psychosociaux. La demande sociale et politique étant aujourd'hui de plus en plus forte il est important d'avoir quelques repères en vue d'aborder cette problématique en entreprise.
Qu'entend-on par « risques psychosociaux » ?
Le rapport du Collège d'expertise sur le suivi des risques psychosociaux au travail (11 avril 2011) définit les « Risques psychosociaux au travail » comme « les risques pour la santé mentale, physique et sociale, engendrés par les conditions d'emploi et les facteurs organisationnels et relationnels susceptibles d'interagir avec le fonctionnement mental. »
Cette définition regroupe ainsi, par exemple, les situations de travail source de dépressions, d'épuisement physique et mental, de troubles musculo-squelettiques, de stress, d'accidents du travail (agressions notamment). Les causes sur le plan collectif sont souvent multiples et en interaction.
Quelles obligations ?
Les risques psychosociaux ne sont pas explicitement évoqués comme tel dans le code du travail. Cependant, des textes de nature générale obligent l'employeur à évaluer et à traiter ce risque. Ainsi, si l'obligation de prendre en compte ces risques n'est pas nouvelle, elle a été précisée et renforcée depuis les années 2000.
Ainsi, le code du travail aborde cette notion dans les textes suivants :
- Art. L4121-1 : L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
- Art. L1321-2, 2e alinéa : Le règlement intérieur (entreprises de plus de 20 salariés) doit rappeler les dispositions du Code du Travail concernant les harcèlements moral et sexuel.
- Art. L1152-4 : L'employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.
- Art. R4121-1 : L'évaluation des risques est sous la responsabilité de l'employeur qui doit rédiger et mettre à jour régulièrement un document unique relatif à l'évaluation des risques professionnels et surtout mettre en oeuvre des mesures de prévention.
Par ailleurs, des accords nationaux interprofessionnel ont été rendus obligatoires par Arrêtés : sur le stress au travail (arrêté du 23/04/2009) puis sur le harcèlement et la violence au travail (Arrêté du 23/07/2010). Ces Arrêtés rendent obligatoire au sein de toutes les entreprises (quelques soient la taille et l'activité) d'identifier, de prévenir et de gérer ces risques.
Qu'est-ce que cela coûte aujourd'hui aux entreprises ?
Le coût des atteintes liés à ces risques est difficilement chiffrable et ce pour plusieurs raisons. Tout d'abord il convient de souligner qu'actuellement les maladies mentales liées aux risques psychosociaux n'entrent pas dans le système traditionnel de reconnaissance des maladies professionnelles. Il n'existe en effet pas de tableau de maladie professionnelle lié à ce type de risque. La reconnaissance est toutefois possible sur la base d'une expertise individuelle après saisine du Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles. Cette reconnaissance est possible lorsque le salarié est victime d'une incapacité supérieure à 25% ou qu'il est décédé. Ainsi, une dépression liée au travail et provoquant le suicide du salarié peut être reconnue comme maladie professionnelle, cette possibilité a été récemment illustrée.
Par ailleurs, il est difficile de chiffrer le coût du mal-être ou de la démotivation des salariés. Ces données sont parfois évaluées dans les entreprises en chiffrant le coût lié à l'absentéisme. Toutefois, il faut rappeler que l'absentéisme n'est qu'un coût parmi d'autres des risques psychosociaux et qu'il est nécessaire de distinguer la part de cette absentéisme lié aux risques psychosociaux.
Cependant, une étude remise à jour en 2007 par l'INRS a évalué, en France, le coût lié au seul stress. Cette étude a pris en compte les pathologies les plus connues liées au stress (maladies cardiovasculaires, dépression, TMS). Le coût total (pour la Société et les entreprises) a été estimé entre 1800 et 2900 millions d'euros soit 15 à 25% du budget actuel de la branche AT/MP de la Sécurité Sociale ou encore près de 0,10% du PIB français.
Quelle démarche de prévention mettre en place ?
Traiter le sujet des risques psychosociaux est une occasion intéressante de rassembler de multiples acteurs (internes et externes) de l'entreprise pour s'intéresser au travail, aux conditions de sa réalisation et enfin aux conditions de son amélioration (organisation, communication, …). Traité d'un point de vue collectif, c'est un sujet qui permet à la fois d'améliorer le bien-être général des salariés et la performance économique de l'entreprise.
Pour obtenir un résultat satisfaisant pour les différents acteurs de l'entreprise certaines étapes et principes doivent être respectés :
- s'assurer que l'entreprise n'est pas dans un contexte de crise sociale (restructuration importante, évènement grave…). Dans ce cas, la priorité est de traiter directement la crise en cours par des démarches de type accompagnement au changement, soutien psychologique des salariés potentiellement en souffrance par exemple.
- obtenir l'engagement de la direction sur une démarche complète et durable (du diagnostic à l'action si nécessaire) puis des représentants des salariés.
- établir un pré-diagnostic sur la base d'indicateurs sociaux et organisationnels disponibles : étude de l'évolution du taux de démission, du taux d'absentéisme, du taux de licenciement (autre qu'économique), des visites médicales sur demande des salariés, prévalence des symptômes liés au stress (point de vue du médecin du travail)… L'attention est attirée sur le fait que l'absence d'indicateur dans le « rouge » ne doit pas empêcher de mener une démarche d'évaluation puis de prévention dans la mesure où des facteurs de risques peuvent exister sans avoir encore provoqués de conséquences sur le personnel.
- constituer un groupe de pilotage composé de membres de la Direction, de représentants des salariés, du médecin du travail, des préventeurs internes le cas échéant. Ce groupe aura pour mission de valider l'outil de diagnostic à mettre en place, de choisir les groupes homogènes d'exposition pour avoir une approche collective du risque, de concevoir un plan de communication à destination du personnel.
- conduire un diagnostic collectif : il est important d'interroger les salariés sur leur vécu lié au travail. Plusieurs méthodes et outils existent :
- L'utilisation de questionnaires validés scientifiquement pour la mesure des facteurs de risques et d'atteinte à la santé : ceux-ci doivent permettre d'évaluer un faisceau de facteurs de risques le plus large possible, être adaptés au milieu du travail pour permettre d'identifier les facteurs liés au travail. La méthode par questionnaire est adaptée à partir d'une taille de 100 salariés pour être statistiquement valable. Des questionnaires validés permettent une comparaison par rapport à une base de données de référence (sur plusieurs milliers de salariés en général).
- Les groupes à thèmes : interrogation collective ou individuelle de salariée sur des thématiques précises ou des secteurs particuliers de l'entreprise.
- analyser et restituer les résultats au groupe de pilotage puis à l'ensemble de l'entreprise.
- élaborer un plan d'actions si nécessaire en fonction des résultats en privilégiant les actions de prévention qui permettent d'agir à la source des problèmes identifiés (meilleure définition des rôles, aménagement de l'environnement de travail, information et communication au sein de l'entreprise…). En complément, et seulement en complément, des actions visant la gestion, le suivi et la prise en charge de problèmes individuels peuvent être proposées (formation à la gestion du stress, hotline d'écoute, sophrologie, méditation, massage,…).
Auteur : Preventiv'
Guillaume BARD
Gérant - Consultant formateur en sécurité au travail
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