En effet, si "la majorité et l'opposition déclarent toutes deux vouloir interdire l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures de schiste, elles ne s'accordent pas sur la rédaction du texte, notamment sur l'abrogation des permis de recherches déjà délivrés" (Localtis.info)
Ce que prévoit le texte
C'est la mise sous condition de l'abrogation des permis déjà accordés qui divise les parlementaires. En effet, "la version initiale du texte prévoyait une abrogation pure et simple des permis, mais les députés ont finalement décidé que leurs titulaires auraient deux mois pour déclarer la technique utilisée. C'est seulement s'ils recourent à la fracturation hydraulique, ou s'ils ne répondent pas, que les permis seront abrogés." (PublicSenat.fr) En outre, le texte ouvre la possibilité de continuer les explorations scientifiques y compris par fracturation hydraulique.
"Un système hypocrite"
Le gouvernement argue qu'il fallait trouver une procédure juridique et réglementaire permettant d'annuler rétroactivement les permis d'exploration et d'exploitation accordés en mars 2010 par Jean-Louis Borloo et que c'est l'objet même de la déclaration de technique qui doit être faite. Mais l'opposition dénonce là un système hypocrite : "quelle déception, alors que l'ensemble de la classe politique semblait à la mi-avril vouloir interdire l'exploration des hydrocarbures de roche, la loi, contre toute attente, légalise la pratique sous couvert de recherche scientifique", s'est exclamé Michel Billout (CRC-SPG, communiste et parti de gauche).
Pour Nicole Bricq (PS) "les sociétés (pétrolières) ont gagné un premier round". (Le Parisien.fr)
Un rapport aux conclusions divergentes !
Juste avant le vote du Sénat un rapport parlementaire a été présenté (le 8 juin). Ses conclusions divergent selon les sensibilités de ses rapporteurs. Ainsi, " L'élu socialiste du Gers [Philippe Martin] y affirme que la France doit renoncer à extraire de son sous-sol les hypothétiques gaz et huile de schiste qui s'y trouveraient et qu'elle doit à court terme abroger les permis exclusifs « imprudemment » accordés par le gouvernement en mars 2010. Pour lui, les risques sont trop élevés, notamment ceux de conflits d'usage de l'eau, de pollution des nappes, sans oublier le fait que produire du gaz de schiste contribuera sur le long terme à aggraver le danger du réchauffement climatique." (Les Echos.fr) En face, François-Michel Gonnot (UMP) considère, au contraire, qu'il ne faut « jamais dire jamais » et qu'une interdiction serait « gravement préjudiciable » à l'industrie pétrolière et gazière. « Je suis persuadé que cette interdiction ne sera que temporaire. Comment pourrait-il en être autrement si notre sous-sol renferme vraiment les richesses en hydrocarbures que disent les experts ? », ajoute-t-il. (Les Echos.fr)
Une Commission d'évaluation qui entérine une stratégie d'attente
L'article 1 bis du texte adopté par le Sénat en commission crée une "commission nationale d'orientation, de suivi et d'évaluation des techniques d'exploration et d'exploitation des hydrocarbures liquides et gazeux" afin d'évaluer leurs "risques environnementaux ". Une structure décriée par l'opposition : "On se moque de qui ? Les risques environnementaux sont connus. Pas besoin d'une telle structure supplémentaire !", s'est exclamé Michel Billout (CRC, Seine-et-Marne). "Si nous acceptons cette commission nationale, nous ouvrons la porte à la possibilité de mettre en place l'exploration et l'exploitation" des hydrocarbures de schiste, a-t-il alerté (Localtis.info) De son côté, "la socialiste Nicole Bricq a cité les propos de Christophe de Margerie, PDG de Total, lors de l'assemblée générale du groupe pétrolier le 13 mai dernier. Celui-ci, comptant garder ses droits, avait qualifié la rédaction de la proposition de la loi d'"habile", affirmant "faire en sorte qu'un jour les gens comprennent qu'on puisse faire de la fracturation hydraulique de manière propre". Pour Nicole Bricq, les industriels vont adopter "une stratégie d'attente pour reprendre plus tard leurs activités". (Localtis.info)
Où en est le texte ?
L'Assemblée Nationale et le Sénat ayant adopté des textes différents, une commission mixte paritaire doit être réunie le XX juin pour trouver un texte de compromis avant le vote finale dans les deux assemblées.
Une opposition qui se mondialise
D'après un récent rapport américain, la Pologne possède les plus importants gisements de gaz de schiste en Europe, estimés à 5.300 milliards de mètres cubes qui pourrait lui assurer une indépendance énergétique par rapport à la Russie. Total et ExxonMobil ont déjà pris des parts dans des concessions d'exploration dans ce pays. Une délégation de cinq eurodéputés verts, dont le Français José Bové et l'Allemand Reinhard Bütikofer, sera mardi et mercredi à Varsovie pour sensibiliser le gouvernement polonais aux risques liés à l'exploitation des gisements de gaz de schiste dans ce pays. La Pologne prenant le 1er juillet la présidence de l'Union européenne, les élus d'Europe-Ecologie vont également plaider, avertit José Bové, pour que Varsovie favorise l'émergence d'un cadre légal européen pour combler le vide juridique qui entoure l'exploitation des gaz de schiste. (AFP)
Auteur : Par Sophie Hoguin, actuEL-HSE