Comment l'organisation du travail influence les accidents du travail

Classé dans la catégorie : Général

Dans une étude originale, la Dares analyse l'influence des nouvelles formes d'organisation du travail inspirées du toyotisme sur le risque d'accident du travail ou de TMS des salariés. Une des innovations de l'approche consiste à rapprocher systématiquement les données sur les accidents et l'évolution de la productivité.

Dans les années 1970, l'entreprise japonaise Toyota met en place de nouveaux modes de production qui vont marquer un tournant dans l'organisation du travail. Inspirant de très nombreuses entreprises, ces formes d'organisation regroupées sous le terme générique de "toyotisme" se caractérisent par une production "au plus juste", en flux tendu et sans gaspillage (ni de temps, ni de matière, c'est le concept de la "lean production". Si les délais et les effectifs sont calculés au plus juste, leur mise en place nécessitent aussi la création de bonnes pratiques et s'appuient sur un système d'amélioration continue. Ce qui a inspiré les normes comme la norme de qualité ISO 9001. Ces formes d'organisation impliquent de manière plus personnelle les salariés.

Les conséquences définies a priori

De nombreux travaux empiriques ont essayé d'évaluer quelles répercussions ces changements d'organisation avaient sur les conditions de travail et la santé des salariés. A priori, on s'attend à constater une recrudescence des accidents et des troubles musculosquelettisues (TMS) par inexpérience et/ou par augmentation de l'intensité du travail pour obtenir l'augmentation de la productivité recherchée. Cependant, certaines organisations pose comme fondement l'amélioration des conditions de travail. Mais alors sont-elle efficaces ? La littérature ne propose pour l'instant pas de résultats francs dans les deux cas. Selon certains auteurs la productivité augmente, selon d'autres elle peut se dégrader. Cette étude propose de mettre en regard l'aspect productivité et l'aspect accidents du travail/TMS.

Un bon point pour l'ISO 9001

Parmi les résultats de l'étude, il apparaît que l'obtention de la certification ISO 9001 soit bénéfique tant sur le plan de la productivité que sur celui des accidents du travail à court et moyen terme et des TMS à moyen terme. Mais, "ceci uniquement dans les grandes entreprises (à partir de 200 salariés)" précise le rapport. C'est une donnée nouvelle qui n'avait jusqu'alors pas été mise en évidence. Pour les petites entreprises, l'ISO 9001 ne semble pas avoir d'incidence sur les AT ou la productivité. Pourquoi ? Les auteurs avancent l'hypothèse que les petites entreprises ne peuvent se permettre l'effort nécessaire à l'analyse des accidents et ni faire appel aux ressources nécessaires pour évaluer, proposer et mettre en place les moyens humains et matériels pour un travail en sécurité maximale. Ajoutant que "en outre, l'obtention de la certification leur est sans doute souvent imposée par un donneur d'ordre, et elles sont de fait plus susceptibles de considérer les outils proposés par la certification comme de simples formalités pour l'obtenir, sans chercher à en retirer un profit."

Un mauvais point pour les labellisations

Mais il n'est pas de même pour toutes les certifications. Ainsi relèvent l'étude, la certification ou labellisation des biens et des services s'accompagne en moyenne d'une hausse des accidents. Pour les auteurs "la labellisation contraint l'entreprise à produire un bien ou service qui respecte des critères précis (niveau de qualité minimal, caractéristiques précises . . .). Le surcroît du risque d'AT provient vraisemblablement du fait que les exigences de la norme modifient le travail des salariés ou en accroissent l'intensité, au point que ces derniers éprouvent des difficultés à s'adapter.

De nombreux paramètres entrent en jeu

Quant aux méthodes de type analyse fonctionnelle ou analyse de la valeur, elles sont généralement associées à une baisse du risque d'accidents mais aussi de la productivité. Pour les auteurs ce serait parce que ces dispositifs améliorent la sécurité au prix d'un coût d'adoption qui freine la productivité. Mais les résultats, à un niveau plus fin révèlent aussi que les conséquences des différents modes d'organisation ne sont pas les mêmes selon leur secteur d'activité. Mais cette étude, toute originale qu'elle soit, n'en connaît pas moins des biais sur lesquels les auteurs reviennent : "si les données en notre disposition sont très riches, elles ne renseignent pas sur certains dispositifs (comme la rotation des postes) ou certaines pratiques (comme les formations proposées à la main d'oeuvre) qui pourraient avoir un lien avec les AT et être corrélés avec l'adoption des nouvelles pratiques organisationnelles. En particulier, la mise en place du juste-à-temps n'influe pas, contrairement à nos attentes, sur le risque d'AT (sauf dans des secteurs comme le commerce de gros, le conseil et l'assistance), peut-être parce que le dispositif est constamment associé à la rotation des postes."

*Dares : Direction de l'Animation de la Recherche, des Etudes et des Statistiques

Documents joints : L'étude de la Dares (pdf).

Auteur : Par Sophie Hoguin, actuEL-HSE.

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