En raison du vieillissement de la population active, la transmission des savoirs devient, pour les entreprises, une question stratégique. Il ne faut, en effet, pas s'illusionner : “Même dans le cas où des formations professionnelles existent, celles-ci ne suffisent pas. En effet, les savoirs de métier et de protection se développent principalement en étant confrontés à des situations concrètes de travail.” Il est donc précieux, pour les organisations, d'identifier les facteurs qui favorisent une “transmission informelle” des savoirs entre travailleurs expérimentés et novices. Des chercheurs canadiens en ont identifié sept.
1. Une charge de travail équilibrée. En effet, “plus les effectifs de travail sont serrés pour la production à fournir ou les services à dispenser, moins il y a de temps et de disponibilité d’esprit pour l’activité de transmission”. Il convient donc de prendre en compte la tâche de transmission dans la charge de travail incombant aux professionnels expérimentés.
2. Le temps nécessaire. “L’activité de transmission prend du temps. Du temps pour expliquer, discuter, observer et confronter des points de vue. Du temps pour que les novices intègrent graduellement les savoirs de métier et de prudence qui leur ont été transmis.” Il importe donc de dégager du temps au travailleur expérimenté. Sans quoi son rôle de transmission passera toujours après ses autres tâches.
3. La reconnaissance des savoirs de métier. Pour que les travailleurs transmettent leurs savoirs, il faut que ceux-ci soient reconnus tant par eux-mêmes que par leur hiérarchie et par les novices. Le désir de transmission est en effet indexé sur la fierté professionnelle.
4. Des moments et des lieux de rencontres, telles que les formations et les réunions, sont bénéfiques. Ils permettent le développement d'échanges informels en dehors du travail ordinaire.
5. L’engagement de la direction se traduisant par “l’existence de dispositifs d’intégration des novices et de soutien aux personnels expérimentés” est également crucial. Il faut notamment que la hiérarchie stipule clairement que la transmission des savoirs est une mission à part entière.
6. Des pratiques de RH adaptées. Les chercheurs ont ainsi remarqué que l'implication des cadres intermédiaires dans le processus d'embauche favorise ensuite la transmission des savoirs.
7. Une précarité réduite. La précarité d’emploi et la mobilité professionnelle ont un effet indirect sur la transmission car elles nuisent “à la stabilité des équipes de travail qui sont un levier essentiel à celle-ci.” Lorsque les équipes sont en recomposition continuelle, cela peut “démobiliser les expérimentés qui doivent constamment initier de nouvelles recrues”. Sans compter qu'un travailleur qui se sent menacé dans son emploi hésitera à transmettre ses savoirs à un novice envisagé, à tort ou à raison, comme un rival.
Autant de critères qui démontrent que la prévention des risques professionnels ne peut décidément pas être envisagée indépendamment du management. Tout simplement parce qu'elle constitue une question managériale à part entière.
Consulter l'étude de l'IRSST La transmission des savoirs de métier et de prudence par les travailleurs expérimentés Comment soutenir cette approche dynamique de formation dans les milieux de travail (pdf).
Auteur : La rédaction de Point Org Sécurité