Agroalimentaire, surmonter les contraintes

Le secteur agroalimentaire présente une sinistralité particulièrement élevée, liée à la nécessité de transformer des aliments dans des ambiances particulières, au plus près d’outils souvent dangereux et avec des matières premières qui peuvent limiter l’automatisation. Parfois, les contingences d’hygiène sont également en contradiction avec la prévention des risques professionnels.

En France, l’agroalimentaire constitue le premier secteur industriel en nombre de salariés. Près de 500 000 professionnels, dans des grands groupes et des entreprises artisanales, transforment du poisson, de la viande, des fruits, des légumes ou des céréales, confectionnent des boissons ou des plats… Le secteur connaît une sinistralité particulièrement élevée, liée à différents facteurs en relation avec l’activité.

Le travail au froid, au chaud, dans des ambiances humides, les manutentions manuelles répétitives, les ports de charge, les postures contraignantes, l’utilisation d’outils tranchants, la présence d’huiles, de graisses, de micro-organismes pathogènes… sont autant de facteurs de risques qui conduisent à bon nombre d’accidents du travail et de maladies professionnelles. Les chutes et glissades représentent la première cause d’accidents, suivies des coupures. Les machines sont, quant à elles, à l’origine de 9 à 10 % de ces accidents.

Sans surprise, les troubles musculosquelettiques (TMS) sont ultra-majoritaires parmi les maladies professionnelles reconnues dans l‘agroalimentaire et constituent 95 % des cas. Dans les 5 % restant, se trouvent notamment les allergies - comme l’asthme du boulanger ou les allergies liées aux produits de nettoyage ou aux moisissures - qui peuvent se déclarer tout au long de la carrière, ainsi que, plus rarement, les zoonoses (maladies transmises par l’animal).

Des matières premières variables

À ce large panorama s’ajoutent les multi-expositions, qui peuvent favoriser l’apparition de pathologies ou les aggraver, à l’image du travail répétitif dans le froid qui favorise la survenue de TMS. Elles peuvent aussi être génératrices d’accidents comme lorsque le froid – encore lui – engourdit les mains qui manipulent des couteaux.

Autre particularité de l’agroalimentaire, la non-uniformité des matières premières ne permet que rarement une automatisation aussi poussée que dans d’autres secteurs. Une absence de calibrage qui impose aux professionnels de rester en contact avec le produit, de le travailler manuellement pour s’adapter à ses variations, ce qu’une machine est incapable de faire. Cela implique des efforts physiques, des gestes répétitifs… et parfois de s’exposer à des risques mécaniques lorsque le poste est situé sur des convoyeurs à l’entrée ou à la sortie de machines. La meilleure façon de s’assurer de l’accès en sécurité aux produits est d’intégrer la prévention des risques dès la conception de la machine. Pour ce faire, le cahier des charges doit préciser toutes les spécificités, comme l’utilisation de matériaux résistant à certains aliments tels que les poissons ou les épinards, sous peine de détérioration rapide du matériel.

Il est également important de tenir compte des phases hors production, comme le nettoyage et la maintenance, en intégrant des solutions qui les sécurisent et les facilitent. D’autant que ces opérations s’effectuent souvent de nuit ou dans l’urgence, entre deux prises de poste, avec en plus le stress lié aux vérifications du service qualité, indispensable pour maintenir un bon niveau d’hygiène.

Prévenir dès la conception des machines

Quand elles sont en contradiction avec les injonctions relatives à la santé et la sécurité au travail, les obligations réglementaires en matière d’hygiène apportent des contraintes supplémentaires qui ne facilitent pas la tâche des entreprises. Citons à titre d‘exemple la problématique des sols. D’un côté, la prévention des chutes milite pour un revêtement rugueux, tandis que les considérations visant à empêcher la prolifération des bactéries et moisissures plaident pour une surface la plus lisse possible. La solution réside dans un compromis entre la glissance du sol et sa capacité à être aisément nettoyé. A contrario, l’expérience de la gestion des contraintes liées à l’hygiène a été un atout dans la mise en place de protocoles visant à limiter les contaminations par le virus de la Covid. Les masques, les lavages réguliers de mains, les sens de circulation… autant de pratiques bien ancrées que les entreprises de l’agroalimentaire n’ont eu qu’à adapter et à étendre.

De manière générale, les conditions de travail difficiles ont conduit ces dernières années à l’apparition de difficultés de recrutement pour les acteurs du secteur qui se retrouvent parfois freinés dans leur dynamique de progression. Un mal pour un bien, est-on tenté de dire à la lumière des prises de conscience provoquées par cette situation. Gageant que de bonnes conditions de travail représentent un puissant levier de fidélisation des effectifs, de nombreuses entreprises s’engagent en prévention, en mettant en place des démarches structurées et pérennes qui s’avèrent en outre bénéfiques pour leurs performances.

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