Repenser la féminisation en entreprise : au-delà des logiques patriarcales

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De nombreuses entreprises, conscientes de la nécessité de féminiser leurs effectifs, mettent en place des dispositifs pour promouvoir l’égalité femmes-hommes. Cependant, ces initiatives reposent souvent sur des critères issus d’une culture patriarcale, renforçant des inégalités qu’elles prétendent combattre. Les réseaux féminins des entreprises, notamment ceux du SBF120, ont permis de rendre visible la question du « plafond de verre » et d’accroître la présence des femmes dans les postes de pouvoir. Toutefois, une étude menée sur un réseau féminin d’une grande entreprise montre que les logiques patriarcales persistent.

L’indicateur clé utilisé pour évaluer la féminisation des postes cadres repose sur un modèle de carrière masculin. En effet, ce modèle valorise la gestion de gros effectifs, de budgets importants et la production de chiffre d’affaires, critères historiquement associés à des hommes, souvent libérés des contraintes liées à la gestion du foyer. Ainsi, les femmes doivent s’adapter à ce système pour réussir, sans que les structures de pouvoir patriarcales soient remises en cause. Cette approche ignore également les inégalités vécues par les employés qui ne suivent pas cette trajectoire hiérarchique classique, excluant notamment ceux qui privilégient des carrières expertes plutôt que managériales.

Les dirigeants, confrontés à un manque de candidates pour des postes de pouvoir, cherchent des solutions à court terme, comme recruter en externe ou promouvoir des femmes avant qu’elles ne postulent. Toutefois, ces méthodes n’adressent pas les barrières structurelles qui freinent les femmes dans leur progression professionnelle. Des formations sont proposées aux managers pour promouvoir la mixité, mais elles sont justifiées par la performance économique, renforçant l’idée que la présence des femmes est utile si elle améliore la productivité, plutôt que pour une véritable égalité.

Par ailleurs, les formations dédiées aux femmes dans ces entreprises, bien qu’ayant pour objectif de les aider à progresser, perpétuent souvent des stéréotypes de genre. Elles valorisent des qualités dites « féminines » comme la coopération ou l’empathie, tout en soulignant qu’elles complètent les qualités « masculines » comme la compétitivité. En outre, ces formations responsabilisent individuellement les femmes, les enjoignant à s’adapter aux exigences professionnelles sans remettre en question les normes structurelles.

En conclusion, ces dispositifs de féminisation ne suffisent pas à briser les structures patriarcales qui continuent de façonner les inégalités. Il est donc crucial de repenser les modèles de travail et de remettre en cause les normes de genre dans l’organisation du travail et de la société.

Source : Une illusion d’égalité : quand féminiser les postes de pouvoir reproduit les inégalités.

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