En 2009, la France comptait 3,5 millions de travailleurs de nuit, soit un million de plus qu’en 1991, constate la Dares (Direction de l'Animation de la Recherche, des Etudes et des Statistiques) dans une étude publiée le 3 février. Cette enquête révèle aussi que les femmes sont de plus en plus nombreuses à travailler de nuit et que les conditions de travail sont nettement plus difficiles que de jour.
Les trois quarts des salariés qui travaillent la nuit le font dans les services : 31 % dans le secteur public et 42 % dans une entreprise privée de services. Santé, sécurité et transports restent en effet les principaux secteurs recourant au travail de nuit. Toutefois, celui-ci s’est développé plus rapidement dans l’industrie.
À autres caractéristiques comparables, les salariés qui travaillent la nuit ont une rémunération plus élevée mais des conditions de travail nettement plus difficiles que les autres salariés : ils sont soumis à des pénibilités physiques plus nombreuses, une pression temporelle plus forte, des tensions avec leurs collègues ou le public plus fréquentes. 15,2 % des salariés travaillent de nuit, occasionnellement pour 8 % des salariés, habituellement pour 7,2 % d’entre eux. La proportion de travailleurs de nuit « habituels » a plus que doublé en 20 ans (elle était de 3,5 % en 1991).
Il ressort de l’étude que 21,4 % des hommes et 9 % des femmes travaillent la nuit, une différence qui s’explique en partie par le type d’emploi occupé. Ceci étant, le nombre de femmes travaillant la nuit a doublé en 20 ans : elles étaient 495 000 en 1991 (soit 20 % des travailleurs de nuit) contre 1,018 million en 2009 (près de 30 % des travailleurs de nuit). Dans le même temps, le nombre d’hommes travaillant la nuit n’augmentait que de 26 %. La modification de la législation française en 2001, qui s’est mise en conformité avec les normes européennes, semble avoir contribué à cette « féminisation » du travail de nuit : les femmes ont en effet été autorisées à travailler de nuit dans l’industrie. La hausse du nombre de femmes travaillant la nuit a d’ailleurs été très marquée dans les industries agroalimentaires (de 3,7 % en 1993 à 14,9 % en 2008) et l’industrie automobile (de 3,5 à 13 %). Concernant l’âge, ce sont les hommes de 30 à 34 ans qui travaillent le plus la nuit (près de 25 %). La fréquence de ce travail diminue ensuite légèrement, et plus fortement à partir de 50 ans. Les différences entre les femmes selon l’âge sont moins marquées : seule une légère diminution de la proportion de femmes concernées se fait sentir après 30 ans.
Le travail de nuit se cumule souvent avec d’autres formes d’horaires atypiques. Ainsi, les salariés travaillant de nuit travaillent souvent le samedi ou le dimanche. Ceux travaillant occasionnellement de nuit ont souvent des horaires variables d’une semaine sur l’autre (42,8 %) et sont plus nombreux que les autres à ne pas connaître leur horaire du lendemain (8,6 %). De plus, un tiers des salariés travaillant de nuit a des horaires alternés et un autre tiers des horaires variables d’une semaine à l’autre.
Par ailleurs, les travailleurs de nuit semblent soumis à des conditions de travail nettement plus difficiles que les autres salariés. Ils sont plus souvent polyvalents, mais ne semblent pas disposer d’une grande marge de manœuvre décisionnelle. Ils sont en outre plus souvent soumis à de fortes contraintes de rythmes. Ils sont en outre plus souvent confrontés à des publics en détresse, des tensions, des agressions. Par ailleurs, leur travail comporte plus de pénibilités physiques et de contraintes de vigilance et ils risquent plus souvent d’être blessés ou accidentés. Le collectif de travail, l’entraide sont donc particulièrement importants. Enfin, le sentiment d’usure se fait très présent et nombreux sont ceux qui ne penseront pas atteindre les 60 ans ou leur retraite. Le travail de nuit a en effet des répercussions physiques et psychologiques négatives sur la santé. Mais il continue d’attirer des salariés qui y trouvent souvent un intérêt financier.
Pour en savoir plus : http://www.travail-emploi-sante.gouv.fr/IMG/pdf/2011-009.pdf
Auteur : La lettre de la sécurité
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