Le cas Marivain : une exposition méconnue aux pesticides et ses conséquences

Classé dans la catégorie : Risques pour l'Homme au travail

Le cas de Laure Marivain illustre un drame lié à l'exposition professionnelle aux pesticides, hors du domaine agricole traditionnel. Fleuriste de profession, Laure a manipulé des fleurs coupées importées, fortement traitées par des substances souvent interdites en France, durant sa grossesse sans être informée des risques. En 2022, sa fille Emmy est décédée d'un cancer à l’âge de onze ans. Emmy est aujourd'hui la première enfant dont la mort a été reconnue par le Fonds d'indemnisation des victimes de pesticides, marquant un cas inédit.

Les sociologues Jean-Noël Jouzel et Giovanni Prete, spécialistes de l'exposition professionnelle aux pesticides, ont suivi le parcours de Laure Marivain. Ils soulignent le manque criant d'information et de prévention pour les professionnels comme les fleuristes. En effet, contrairement à l'agriculture, l'exposition aux pesticides dans d'autres secteurs, comme l'entretien des espaces verts ou le commerce de fleurs, est souvent négligée. Les études sur ce sujet sont rares, notamment en France, bien que certaines recherches européennes et belges aient montré des niveaux d'exposition non négligeables chez les fleuristes. En conséquence, peu de prévention est mise en place pour ces travailleurs, malgré la possibilité d'expositions indirectes, c’est-à-dire par contact avec des objets ou des produits contaminés.

Les pesticides, loin de rester confinés aux zones agricoles, circulent sous forme de résidus sur des produits importés, notamment les fleurs. Ces dernières ne sont soumises à aucune limite réglementaire en matière de résidus chimiques, contrairement aux produits alimentaires, ce qui pose un problème majeur de prévention et de santé publique. Il devient crucial de mener des recherches plus approfondies sur toute la chaîne d'exposition (transport, conditionnement) et de diffuser ces informations pour améliorer la protection des travailleurs.

Le Fonds d'indemnisation des victimes de pesticides, créé en 2020, permet désormais d’indemniser non seulement les agriculteurs, mais aussi les enfants exposés in utero, comme Emmy. Cependant, ce fonds reste encore trop limité dans ses actions et ne propose pas d’indemnisation aussi complète que celle offerte aux victimes de l’amiante. Le cas de Laure Marivain a également mis en lumière les obstacles administratifs et psychologiques que rencontrent les familles non agricoles dans leurs démarches, ces dernières étant souvent freinées par un sentiment de culpabilité.

L’affaire Marivain souligne l’urgence d’améliorer la prévention et la reconnaissance des risques liés aux pesticides dans des professions autres que l’agriculture, afin de protéger les travailleurs et leurs familles.

Source : Exposition des fleuristes aux pesticides : « Ce qui nous a beaucoup surpris, c’est l’absence totale de prévention ».

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