"Les ministres souhaitent que le futur compte se mette en place dans des conditions de simplicité maximale et de sécurité juridique, tant du point de vue des entreprises pour leurs obligations de recensement et de déclaration des situations de pénibilité, que du point de vue des salariés pour la mobilisation de leurs droits", affirment Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé, et Michel Sapin, ministre du Travail, de l'Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social, dans un communiqué commun. Ils ont confirmé hier le bruit qui courrait depuis plusieurs jours : Michel de Virville, conseiller-maître à la Cour des comptes – "et fin connaisseur des questions sociales", précisent les ministres – mènera une "mission de facilitation et de concertation permanente sur la mise en œuvre opérationnelle du compte personnel de prévention de la pénibilité."
"Des craintes se sont exprimées"
Le projet de loi sur les retraites, dont le compte pénibilité est la principale nouveauté, a été adopté mardi en deuxième lecture par l'Assemblée nationale, son examen va donc se poursuivre. Depuis la présentation du dispositif (voir notre article), qui a ensuite été précisé (voir notre article), il n'a pas échappé aux ministres que "des craintes se sont exprimées dans le monde des entreprises – les petites mais aussi les plus grandes – et chez les responsables des ressources humaines", exposent-ils dans la lettre de mission remise à Michel de Virville. Et de poursuivre : "en particulier quant aux risques de complexité excessive, ou encore aux risques juridiques de contentieux posés par le futur compte".
Définir les seuils d'exposition
Michel de Virville devra donc "rechercher en permanence la simplicité maximale du dispositif", pour une mise en œuvre opérationnelle qui va devoir répondre aux modalités de fonctionnement et de gestion du compte, aux modalités de calcul et de versement de la cotisation associée, à l'articulation avec la fiche de prévention des expositions et, plus largement, avec les accords et actions de prévention collective de la pénibilité. Il s'agira aussi de définir les seuils d'exposition et leurs modalités d'application. Sans oublier la mise en place des voies de recours qui seront ouvertes aux salariés, les services aux usagers associés à la mobilisation du compte, etc. Le tout pour une mise en place effective du dispositif au 1er janvier 2015.
Le compte pénibilité : qu'es acquo ?
Le compte personnel de prévention de la pénibilité doit permettre de "lier prévention et réparation" pour des salariés exposés à des conditions de travail pénibles. L'exposition sera transformée en "points" crédités sur un compte qui donnera droit à trois possibilités : bénéficier d'une formation de reconversion à un métier moins difficile, bénéficier d'un temps partiel payé à temps plein, bénéficier d'une retraite anticipée d'au maximum deux ans.
Trois espaces
Michel de Virville a la responsabilité d'organiser "un dialogue ad hoc" avec les différentes parties prenantes : médecins du travail, représentant des entreprises et des salariés, DRH, experts-comptables, etc. Il ne lui appartiendra en revanche pas de consulter les "instances formelles" : ce sont les deux ministères qui se chargeront de demander leur avis au Coct (conseil d'orientation sur les conditions de travail), à la Cnav (caisse nationale d'assurance vieillesse), etc. Michel Sapin et Marisol Touraine présideront ainsi un "comité stratégique" qui se réunira mensuellement "tout au long du projet" et que Michel de Virville devra alimenter avec des "analyses, alertes et propositions issues des travaux de concertation". Enfin, il ne faudrait pas oublier le "pilotage opérationnel", confié à "un inspecteur désigné par l'inspection générale des affaires sociales (Igas)". Selon la lettre de mission reçue par Michel de Virville, il s'agit de Thomas Audigé, directeur général adjoint à Pôle emploi, où il a la charge de la maîtrise des risques.

Michel de Virville
Photo : MIGUEL MEDINA / AFP Michel de Virville en 2008.
Le conseiller-maître à la Cour des comptes vient d'être missionné pour organiser la concertation sur la création du compte pénibilité.
Michel de Virville a été secrétaire général puis DRH du groupe Renault et a dirigé le cabinet de Jean-Pierre Soisson, alors ministre du Travail, de 1988 à 1991. Il a aussi présidé la commission des relations du travail et de l'emploi au sein du Medef. Alors membre de l'UIMM (Union des industries et métiers de la métallurgie), il est brièvement élu début 2008, sur proposition du Medef, à la présidence de l'Unedic, organisme paritaire qui gère l'assurance chômage, avant de devoir en démissionner lorsque surgit l'affaire de l'indemnité de départ de l'ancien président de l'UIMM, dont le procès s'est tenu en octobre.
Auteur : Par Elodie Touret, actuEL-HSE.
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