Longtemps considérée comme un signe de paresse ou de manque de professionnalisme, la sieste au travail commence à faire son chemin dans les mentalités, en particulier en France. Et pour cause : dans un contexte où la fatigue chronique devient un véritable enjeu de santé et de sécurité au travail, permettre aux salariés de récupérer quelques précieuses minutes de sommeil pourrait bien être une mesure simple et efficace pour prévenir les accidents professionnels et améliorer la performance.
Une fatigue chronique aux conséquences bien réelles
Selon l’Institut national du sommeil et de la vigilance, plus de la moitié des Français déclarent souffrir de troubles du sommeil impactant leur vie professionnelle. Baisse de vigilance, troubles de la concentration, perte d’énergie… les effets de la somnolence diurne sur la qualité du travail sont loin d’être anecdotiques. Plus grave encore, la fatigue augmente significativement le risque d’erreurs humaines et d’accidents, notamment dans les secteurs où l’attention constante est essentielle : industrie, BTP, transport, santé.
En médecine du travail, 20 à 40 % des salariés consultés évoquent des plaintes liées au sommeil. Les conséquences ne se limitent pas à une baisse de productivité : elles touchent également la santé physique et mentale des travailleurs. Le lien entre manque de sommeil et risques cardiovasculaires est désormais bien documenté. Lors du congrès américain de cardiologie de 2019, une étude a démontré qu’une sieste pouvait faire baisser la pression artérielle, réduisant ainsi les risques d’infarctus.
La micro-sieste : un levier sous-estimé de performance et de sécurité
Face à ce constat, la sieste – notamment la micro-sieste de 5 à 20 minutes – apparaît comme une solution simple, peu coûteuse et aux bénéfices multiples. Elle améliore la vigilance, la mémoire, la capacité de concentration et la gestion du stress. Mieux encore : elle réduit de manière significative le risque d'accident du travail, en particulier dans les contextes à horaires décalés ou à forte intensité cognitive.
Des cultures comme celles de la Chine ou du Japon ont depuis longtemps intégré cette pratique dans le quotidien professionnel. En France, même si elle reste encore marginale, 69 % des salariés y sont favorables, selon un sondage de l’agence Adecco. Une évolution culturelle est donc en cours, mais encore trop peu de structures mettent en place les conditions propices à cette pause régénératrice.
Un droit à exploiter, un cadre à définir
Le Code du travail (article L3121-33) prévoit une pause de 20 minutes pour tout salarié ayant travaillé six heures consécutives. Cette pause peut être utilisée librement, y compris pour une sieste. Tant qu’elle ne nuit pas aux obligations professionnelles ni à la sécurité, cette pratique ne peut être considérée comme fautive.
Toutefois, il reste un flou sur l’obligation d’aménager des espaces adaptés. Si certains grands groupes commencent à proposer des zones de repos, la majorité des entreprises n’envisage pas encore cette possibilité, par crainte d'abus ou par méconnaissance des bénéfices potentiels.
Vers une nouvelle culture de la prévention ?
La sieste ne doit pas être vue comme une faiblesse, mais comme un outil de gestion des risques professionnels. Dans un monde du travail où l'on exige toujours plus de réactivité et de productivité, il est temps de revaloriser la qualité du repos. Encourager la micro-sieste, c’est aussi reconnaître que la vigilance et la sécurité passent par une meilleure prise en compte des besoins physiologiques fondamentaux.
Intégrer la sieste dans les politiques de santé au travail pourrait bien devenir un levier stratégique pour les entreprises souhaitant améliorer la sécurité, réduire l’absentéisme et accroître la performance durable de leurs équipes.
Auteur : Inforisque.Source : Et si on s’autorisait à dormir (un peu) au travail ?.